Test | Divinity : Original Sin
09 juil. 2014

Péché mignon

Testé par sur
Divinity : Original Sin

Laissez-moi me confesser : je n'avais jamais joué à un jeu Larian Studio. Dans mon imagination embrumée, le studio produisait d'obscurs jeux de rôle suivis par une très forte communauté. Mais depuis j'ai vu la lumière, pauvre pêcheur que je suis, et je peux dorénavant affirmer avec conviction que Original Sin est le meilleur jeu de rôle de l'an de grâce 2014. Explications.

L'histoire

Pour le meilleur et pour le pire, KickStarter a engendré un nombre incroyable de titres basés sur les attentes tour à tour nostalgiques et pleines d'espoir de ses parrains. Et puis il y a Larian Studios, pionnier belge de 18 bougies fondé par le pimpant Swen Vincke, qui crée des jeux de rôle depuis des années. Leur campagne avait un objectif simple : pouvoir auto-financer un Ultima VII moderne, jouable à deux et se déroulant dans le monde de Rivellon. Les joueurs ont répondu à l'appel et ont même doublé la mise demandée : plus de 900 000 dollars. Le défi était donc grand pour contenter les backers mais la passion et le sérieux du studio ont payé. Les deux protagonistes sont des source hunters, sorte d'investigateurs médiévaux traquant les utilisateurs de la "source", une énergie magique sacrément néfaste. Dépêchés dans la ville de Cyceal pour enquêter sur le meurtre étrange d'un bourgmestre, il apparaît très vite que la situation est explosive : morts-vivants en pagaille, orcs sur le pied de guerre et miliciens peu coopératifs. Comme dans tout bon jeu de rôle, les journaux de quête se remplissent très vite et l'intrigue s'épaissit de fil en aiguille jusqu'à atteindre des proportions impressionnantes. La progression dans le jeu est bien évidemment laissée entièrement à votre humeur et les quêtes sont excellentes. De la veuve plus ou moins éplorée au maire infatué, l'écriture des personnages et la verve des dialogues sont à se pisser dessus et possèdent l'avantage de ne pas prendre le joueur pour un idiot.
Sourceleur pas sorceleur

Le principe

La direction artistique est variée et chatoyante.

Comme tout bon jeu de rôle, Original Sin démarre par la création du personnage ou plutôt des personnages. Comme Fred Astaire et Ginger Rogers, vos deux héros vont former une paire plus ou moins en osmose qui doit triompher de tous les maux. Les deux compères peuvent rejoindre les rangs de nombreuses classes : guerrier, voleur, magicien ainsi que d'autres plus exotiques. Si le cœur vous en dit, la création est entièrement paramétrable. Trois statistiques rentrent en compte : les attributs (force, dextérité, charisme), les compétences (écoles de magie, spécialité martiale, crochetage) et les talents qui sont des petits bonus à la manière de Fallout. Notez que ces derniers sont très variés et épicent votre personnage. Par exemple, il est possible de parler avec les animaux ou de massacrer les ennemis à terre comme une crevure. Niveau progression, c'est assez simple puisque chaque niveau gagné vous permet d'augmenter ces statistiques. Pour progresser, chaque quête propose plusieurs solutions : le dialogue bien sûr (avec un système agréable de pierre-papier-ciseaux), les gnons ou la furtivité. Exemple : le robot crée par le magicien du coin a été emporté par des individus louches. Plutôt que d'affronter ce formidable adversaire, vous pouvez tout aussi bien utiliser sa télécommande pour lui ordonner de s'autodétruire... enfin si vous avez lu le manuel d'utilisation. Au-delà du cas par cas, Original Sin emploie la méthode Ultima VII (ainsi que sa vue isométrique) à savoir une liberté d'action totale soutenue par une moralité ultra-flexible. Ainsi, toutes les bicoques peuvent être explorées, pillées ou vidées de leurs habitants moyennant certains risques, comme celui d'alerter la garde.

Il serait possible de s'arrêter ici et de dire que Original Sin est un excellent jeu mais le combat n'a pas encore été abordé. Bien que le mot "tour-par-tour" ait refroidi certains éditeurs, le système de combat s'avère l'un des meilleurs en la matière et au demeurant bien plus intéressant que les sempiternelles passes d'armes mongoloïdes en temps réel. Larian a multiplié les possibilités offertes aux différentes classes. Les magiciens héritent d'écoles de sort (feu, glace) dont les effets renvoient à Magicka. En gros, l'eau facilite le courant électrique, l'huile enflamme et le gaz explose. C'est à la fois bordélique et grisant. Heureusement, les autres classes ne sont pas en reste. Les guerriers disposent d'une palette d'attaques bigarrées (saignements et étourdissements en tout genre), les voleurs se faufilent et poignardent tandis que les rangers disposent de multiples flèches aux effets funky. Personne n'est en reste et ça tombe bien car les adversaires voyagent en groupe et sont bien mesquins : invocations, poisons et malédictions en tout genre. Pour compléter vos stratégies, des compagnons sont aussi disponibles avec leur propre histoire et leur personnalité colorée.
Savoir-faire ancestral belge

Le multi

Les joutes verbales se résolvent via pierre-papier-ciseaux.

La dynamique des deux personnages est très bien foutue et prend tout son piquant en jouant avec un ami. De la création jusqu'à la fin du jeu, tout peut être effectué en coopération avec un autre joueur venant dans votre partie. Lors des dialogues, les avis des deux personnages sont souvent sollicités et amènent à des joutes verbales dans l'équipe. Encore mieux, les positions morales prises par chaque personnage influent sur leurs statistiques et les adoubent de différents traits psychologiques : pragmatique, égoïste, etc. Les grandes décisions de dialogue rentrent également sous le jeu du pierre-papier-ciseaux. En substance, les deux joueurs s'engagent dans un duel dont les points sont modifiés par la compétence sociale utilisée (logique/intimidation/charme). Le gagnant peut imposer sa réponse. Si vous n'avez pas d'ami, la schizophrénie reste une solution pour déclencher des duels rhétoriques. Instable durant la bêta, le netcode est parfaitement fonctionnel offrant une expérience optimale.
A deux, c'est mieux

Pour qui ?

Certains combats prennent des proportions énormes.

Si vous aimez les jeux de rôle, les vrais pas les simulateurs de drague déguisés, foncez sur Original Sin. C'est le meilleur sorti depuis plusieurs années. Les initiés comme les nouveaux venus y trouveront forcément leur compte que cela soit par l'écriture habile, le système de combat retord ou le moteur physique complètement barré. Les amateurs de jeu coopératif y trouveront une occasion de se fendre la gueule avec un ami pendant des dizaines d'heures.
Achète, achèèèèète

L'anecdote

Les sorts sont très "son et lumière".

Un talent accessible dès la création de personnage permet de parler aux animaux. Les petits malins de Larian s'en sont donnés à cœur joie. Rats, poulets et fidèles canins vous donneront toutes sortes d'indices utiles ou de conseils pourris au cour de l'aventure. Mention spéciale à la vache du guérisseur qui fait passer une séquence de traite pour une séquence de film érotique.
Manimal
Les Plus
  • L'implémentation des deux personnages
  • Plein de choses à faire
  • Une main tendue vers l'exploration et expérimentation
  • Des dialogues à pleurer de rire
  • Un éditeur intégré
  • Une musique divine
  • Joli et bien optimisé
Les Moins
  • Le butin complètement aléatoire
Résultat

Original Sin est fabuleux. C'est un jeu de rôle à l'ancienne qui tient toutes ses promesses. Drôle, addictif, dense et jouable en coop, ce bijou offre la liberté d'un Ultima VII sans la lourdeur de son système de combat. Ce dernier est remplacé par un système au tour par tour parfaitement calibré utilisant les affinités élémentaires de Magicka. Tous les aspects liés à l'exploration, à l'artisanat et aux quêtes encouragent le joueur à expérimenter et interagir avec l'environnement. Original Sin est plus qu'un bon produit, c'est un travail d'orfèvre et ça serait un crime de passer à côté.

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