Test | The Eternal Castle [Remastered]
20 août 2020

La disquette sous acide

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The Eternal Castle [Remastered]

Quand les trois amis sont retombés sur cette vieille disquette oubliée, ils ne pensaient pas remettre la main sur un tel trésor. Montrer au plus grand nombre ce petit bijou est devenu leur sacerdoce. Le contrat est rempli, puisque vous pouvez à présent jouer à The Eternal Castle [Remastered] sur vos machines actuelles. Attention, claque visuelle en vue. Malgré son affichage en bichromie, son ambiance, ses décors et ses détails chatouillent vos pupilles et vos oreilles et vous plongent la tête la première dans cet hommage aux jeux futuristes des années 1980. Attachez votre ceinture, car oui, il est encore possible d'être décoiffé avec une poignée de pixels et une palette de couleurs flashy.

L'histoire

Catastrophe : une roquette sol-air aide votre vaisseau à s'écraser sur une planète post-apocalyptique, gouvernée par une IA hors de contrôle. À la recherche des blocs d'énergie qui vous permettront de recharger les batteries de votre engin, vous explorez trois zones distinctes (plus une première zone tutoriel), habitées par des autochtones pas nécessairement amicaux. Certains sont revenus à l'époque des Indiens et du far west ; d'autres ont mal vécu une violente irradiation ; les derniers semblent sortis de la Planète des Singes (une petite moulinette génétique vous glissera même dans leur peau)... Chaque univers porte une ambiance et un univers propres, avec ses armes, décors et tribus. Votre but : atteindre le château éternel où réside cette IA maléfique, lui coller la défragmentation de sa vie et vous enfuir de cet étrange endroit. L'histoire tenant donc sur une disquette, passons donc au vif du sujet une fois passé l'écran de chargement façon démarrage sous MS-DOS.
La faute à OK Google qui a déraillé

Le principe

Hop !

Ouvrez grands vos yeux et plongez dans The Eternal Castle [Remastered] comme on replonge dans les trésors du passés, enfouis sous des tonnes de couches de poussière, au fond d'un coffre précieusement conservé au fil des déménagements. Totalement à l'ancienne et l'assumant pleinement, The Eternal Castle [Remastered] mixe habilement les ressors des jeux de plateforme rétro et l'énergie d'un jeu contemporain. Ses trois auteurs ont vraisemblablement grandi avec les classiques Prince of Persia, Another World et évidemment Flashback entre les mains. Les différents niveaux, où l'exploration de plateforme alterne avec des phases de combat à mains nues ou avec des armes glanées au sol, sont composés de segments où le décor avance avec le joueur et d'autres où l'écran reste fixe, à la manière de Flashback. Ce qui a de quoi renforcer l'effet de surprise quand vous foncez tête baissée pour arriver au bord d'un piton rocheux et freinez de justesse dans votre course, déclenchant l'animation adaptée du personnage.

Les niveaux qui se distinguent surtout par leur ambiance sont partiellement générés aléatoirement : quelques passages varient, mais sans en changer non plus totalement la topologie. Outre en arriver au bout et battre le boss qui détient une cellule d'énergie destinée à réparer votre vaisseau, vous collectez quelques artefacts destinés à améliorer vos compétences et des fragments qui, en nombre suffisant, vous seront utiles pour terminer le jeu. Mais étrangement, au sein d'une même partie il ne vous sera pas possible de rejouer un niveau pour le refouiller de fond en comble.
Souviens-toi de ces jeux qui ont marqué ton enfance des années 1980

L'ambiance

Pensif, vous prenez un instant pour réfléchir au sens de la vie en bichromie.

Vert silicone et rouge acidulé, bleu azur et rose flashy : les duos de couleurs si caractéristiques du mode CGA, relégués depuis longtemps aux vieilles machines de grenier, donnent, soyons honnêtes, un charme fou à The Eternal Castle [Remastered]. Certains détesteront, certes, mais les animations des décors et des personnages, toutes en subtilité, donnent immédiatement vie à cet univers en bichromie pourtant réduit à l'essentiel. Les postures du héros, qui rappellent énormément les animations créées par Paul Cuisset dans Flashback avec notamment la passerelle à grimper/descendre, sont clairement un hommage à ce titre et ceux qui en ont découlé par la suite. Et pour parfaire le tout, les bruitages et musiques vous plongent dans une ambiance très électro, sorte de resucée contemporaine et réussie de rythmes des années 1980. La traversée à coups de poing de la scène de danse, où la musique bat son plein au rythme des stroboscopes, reste une séquence mémorable du jeu. En résumé : les ingrédients sont là, et au-delà de leur apparence simpliste, apportent un mélange subtil et audacieux, qui tranche habilement avec le classique pixel art de manière plus affirmée. La sauce prend, on en redemande au point de lécher avidement l'assiette. Et cela tombe bien, car une fois le jeu terminé une première fois, un tout nouveau chapitre se débloque, ainsi qu'un mode versus en guise de dessert.
2 couleurs, c'est plus que nécessaire pour vous transporter dans ce monde incroyable

Pour qui ?

Le genre de boss super vénère mais super facile.

Inabordable ? Ne vous y méprenez pas : à l'inverse des réels jeux de l'époque, The Eternal Castle [Remastered] n'est pas impossible à finir sans consulter l'ETAJV, bien au contraire. Chaque niveau est parsemé de points de sauvegarde, rendant la progression relativement aisée. Un passage où vous manquez de quelques pixels la plateforme après un saut un peu hasardeux ? Pas de problème. Un boss quelque peu énervé et rapide ? Aucun souci. D'ailleurs, si certains boss sont clairement plus costauds que d'autres, chacun bénéficie de son talon d'Achille qu'il vous faudra trouver et exploiter. Quant à la jouabilité, elle est elle aussi revue au goût du jour. Légèrement plus nerveuse, plus conciliante aussi, elle vous laisse la marge d'erreur suffisante pour ne pas mourir à chaque saut, contrairement à ses grands-parents dont le titre s'inspire. Cela rend The Eternal Castle [Remastered] largement accessible au plus grand nombre, sans craindre une difficulté abusivement forte ou des ragequit justifiés. Hum. Si l'on met de côté la course-poursuite de l'énorme boule façon Indiana Jones, où clairement cela se joue à la milliseconde près...
Si vous êtes daltonien, passez votre chemin

L'anecdote

Baston généraaaaaaale !

Diablement malin : contrairement aux apparences, The Eternal Castle [Remastered] n'est un remaster de rien du tout. Ses trois concepteurs ont poussé l'histoire du jeu assez loin, en semant des indices concernant un supposé The Eternal Castle originellement sorti en 1987. On trouve ainsi la trace du jeu sur Internet Archive avec une page dédiée et un zip des fichiers soi-disant originaux (et artificiellement datés de 1987), mais illisibles en réalité. Dans le descriptif du jeu sur Steam, on découvre l'histoire d'un gamin des années 1980 qui découvre une disquette dans les affaires de son père ; cette disquette, une fois bootée sur son 486, chargeait cet incroyable jeu : The Eternal Castle. Plus tard et plus vieux, il deviendra l'un des trois auteurs de ce portage, pour montrer au monde entier la beauté de ce jeu oublié de tous. Faire vivre la légende de ce jeu m'a touché : certes, il s'agit de fake news et à notre époque ça n'est pas très bien vu, mais vous comprenez en quelques instants que cette histoire ne sert qu'à faire découvrir The Eternal Castle [Remastered] et sincèrement : ça fonctionne. On peut aussi y voir la volonté de rendre hommage à ces titres qui ont fait rêver plus d'un enfant, avec leurs graphismes si incroyables pour l'époque que l'on aurait pu penser que ces jeux venaient tout droit du futur. Et la boucle est bouclée.
La vraie-fausse histoire du vrai-faux remastering
Les Plus
  • L'ambiance visuelle étonnante et prenante
  • L'ambiance sonore aux petits oignons
  • Le côté rétro mais avec une maniabilité correcte
  • Quelques références bien vues
  • Un hommage plus que réussi
Les Moins
  • Quelques rares bugs de sortie d'écran
  • Trop de points de sauvegarde tue la sauvegarde
  • Trop court !
Résultat

L'épopée de The Eternal Castle [Remastered] se vit autant par l'histoire générée autour du jeu et son faux remastering que dans l'univers visuel (et presque cinématographique) qu'il est parvenu à créer. Son minimalisme touche à la perfection, créant une ambiance si particulière que vous prendrez plaisir à y replonger, en troquant le héros Adam pour l'héroïne Eve, ou en profitant du niveau débloqué post-générique. Malgré cela, boucler le titre une première fois vous prendra une poignée d'heures ; la promesse de niveaux semi-génératifs laisserait rêver à un jeu plus long, plus aléatoire et moins guidé, mais ça ne sera finalement pas le cas.

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Tribune libre