Test | Max Payne 2
02 nov. 2003

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Max Payne 2

Max Payne, vous vous en souvenez ? C'était ce grand brun taciturne qui mettait à peine huit heures pour venger les meurtres de sa femme et de son nourrisson. Une vraie tapette celui-là, sous ses faux airs de vrai macho, une tarlouze plutôt bien fardée mais qui manquait singulièrement de conversation. Les premières minutes de jeu étaient intenses, certes. Mais après, on se lassait du Bullet Time dont de toute façon on faisait le tour en une journée. Devinez quoi ? Le gars Max récidive et semble n'avoir rien corrigé de ses défauts. Il est toujours aussi prompt à appuyer sur la détente avec classe, mais toujours aussi incapable de tenir en haleine sur la durée ! Comme beaucoup de mecs, en somme.

La guerre des clones

Ce qui surprend d'emblée avec ce Max Payne 2, c'est sa ressemblance frappante avec son auguste aîné. Même type de menus, de musiques, d'interface... au début, on se demande même si on n'a pas réinstallé le premier ! Au jeu des sept erreurs, cette suite se distingue quand même grâce à ses graphismes nettement améliorés. Les textures et la modélisation des personnages sont vraiment très soignées, avec des visages bourrés de polygones qui sont prodigieusement beaux à défaut d'être très expressifs. Max a d'ailleurs changé de tête et n'arbore plus le rictus déjanté du premier opus. Il ne faut pas en conclure pour autant que le gusse est devenu plus fréquentable.

Un côté Python

C'est bien simple, en huit heures de jeu Max trouve le moyen de mourir trois fois. Ca en devient même comique. Tout un quartier explose avec Max au milieu et dès le niveau suivant, on le retrouve dans les décombres avec quand même un léger mal de tête. Ce n'est plus Max Payne, c'est Super Payne ! Il arrive même à survivre à un tir en pleine tête... Le scénario, du coup, donne parfois dans le grand n'importe quoi. Et il est souvent incompréhensible pour ceux qui n'ont pas fini le premier jeu, malgré une séance de rattrapage disponible dans le menu. Il n'installe pas non plus la même atmosphère que le précédent, avec son New-York pris dans une tempête de neige monstrueuse aux relents douçâtres d'Apocalypse. C'est moins glauque, c'est aussi plus répétitif vu que l'on revient jusqu'à trois fois dans les mêmes niveaux et que comble du comble, certaines portions sont bassement dupliquées.

Répétitif, au fond

L'impression de faire toujours un peu la même chose est du coup très désagréable, surtout que les passages d'anthologie sont trop espacés. Le dernier niveau truffé d'explosifs n'est pas mal du tout mais ça pète tellement fort qu'on meurt à chaque nouvelle pièce, ce qui affadit quand même l'expérience. Mais c'est aussi là que l'on se réfugie dans une Panic Room toute droit sortie du film de David Fincher, une sorte de mobile home blindé dont on prendra un malin plaisir à verrouiller l'accès alors qu'un mur de flammes consume quelques malheureux restés coincés dehors. C'est rigolo, mais voilà, je viens de vous gâcher l'un des meilleurs passages du jeu : le reste est nettement moins folichon.

Je vais nettoyer

Dans tout le premier acte du jeu, on passe son temps à massacrer des techniciens de surface qui se précipitent par milliers sous les Uzis de Payne. C'est rigolo au début mais ça devient vite lassant malgré quelques bonnes idées. Au détour d'un couloir, une bonne femme en bigoudis file à Payne son fusil de chasse pour faire le ménage chez ses voisins un rien bruyants, avant de s'enfermer à double tour chez elle. Il faut dire que lesdits voisins raffolent des grenades au point de les lancer dans l'escalier toutes les dix secondes, histoire de rire un peu. Forcément, ça fait du bruit. Un peu plus loin, une pute et son copain le SDF se joignent à Payne pour dératiser l'immeuble au Beretta. C'est sympa mais les pauvres ne font pas long feu. Quelle idée aussi de rester plantés en plein milieu d'un couloir en tirant sans discontinuer, au lieu de faire des roulades et des galipettes !

A malin, malins et demi

Les ennemis, eux, ont une IA bien plus performante. La preuve, ils se cachent derrière des piliers ou, de façon un peu moins pertinente, près de barils explosifs que quelques balles perdues ont vite fait d'enflammer. Ils n'hésitent pas non plus à plonger pour esquiver une décharge de chevrotine ou à lancer quelques grenades, de façon hélas très scriptée. Il suffit de recharger la partie pour vérifier que leurs rares déplacements sont préprogrammés et que la plupart du temps ils fixent sans bouger la porte par laquelle Max sera fatalement obligé de passer. Cela dit, les scripts réservent d'excellentes surprises, notamment des petites scènes pleines de tendresse et de poésie comme ces blaireaux en train de jouer du piano ou de rouler du cul en mimant un défilé de mode. Accessoirement, il leur arrive d'essayer de buter Payne en lui roulant dessus avec une camionnette ou un chariot élévateur amoureusement fourré au C4, ce qui ne marche jamais longtemps grâce à la miraculeuse touche de recharge rapide.

Pas tout noir

Histoire d'être honnête, il faut aussi mentionner les petites scénettes qui durent parfois plusieurs minutes, depuis les dialogues de poivrots avinés enfermés dans leurs cellules jusqu'aux feuilletons télé dégoulinants à souhait du type Les Feux de l'Amour, en pire. Comme les dialogues sont en anglais tout en étant entièrement sous-titrés en français, on en profite au maximum. C'est d'ailleurs l'une des grosses qualités de cette suite. Elle poussera les plus condescendants à observer une minute de silence en mémoire des malheureux qui ont souffert sur l'affreux doublage français du jeu original. Et puis quand même, cette séquelle apporte trois gros bouleversements, enfin, au moins deux et demi. Le premier et le plus visible est la jauge de Bullet Time, celle qui permet de ralentir le temps. Elle se recharge automatiquement une fois vidée, de sorte qu'il n'est plus nécessaire d'accumuler les cadavres de techniciens de surface pour la recharger. Non, là, multiplier les boucheries permet d'avoir une Super Jauge de Bullet Time qui rend l'image sépia et permet de se déplacer aussi vite que Speedy Gonzales.

Tournicoti, tournicota !

C'est en l'activant que Payne déclenche un nouveau mouvement d'une préciosité affriolante. Il virevolte sur lui-même en dézinguant à tout va, façon Manège Enchanté. Il est alors très beau, peut-être un brin flou, mais c'est hélas souvent le moment choisi par un petit malin un rien pervers pour lui coller un pruneau en pleine tête. Résultat, Max termine prématurément sa figure de derviche tourneur, dommage. Pour se consoler, Payne cède la place le temps de quelques niveaux à une charmante donzelle qui ne le laisse pas indifférent, Mona Sax. C'est une belle histoire d'amour qui est d'ailleurs expédiée contre un mur en deux planches façon BD lors d'une simple cinématique (mais les bruitages sont sympas). La belle a les mêmes caractéristiques que Payne et doit le couvrir à un moment en snipant une meute d'encagoulés. Ca a l'air bien dit comme ça mais c'est en fait très pénible, vu que c'est un bon prétexte pour rentabiliser à fond un même niveau. On le traverse d'abord avec Payne, puis avec sa douce et tendre. De quoi plomber l'intérêt du deuxième acte, un brin longuet. En plus, Payne trouve le moyen de perdre tous les remontants qu'on lui avait pourtant laissés, les fameux Pain Killers. D'ailleurs, tous les quatre niveaux environ on perd tout son équipement, soit parce qu'on zappe de personnage, soit parce que Payne fait un détour par l'hosto. C'est frustrant.

Magnitude 9

La dernière innovation est aussi la plus réjouissante, bien qu'elle soit largement sous-exploitée. Le moteur physique est excellent, au point que l'on peut s'en servir pour monter quelques embuscades taquines. Il permet de faire rouler un bidon vers un groupe d'ennemis ou de le faire tomber en contrebas, avant de le faire exploser bien sûr. C'est très marrant mais dans les faits, rien ne vaut une bonne grenade, plus précise et plus efficace. Dommage, mais on retrouvera certainement cette caractéristique dans tous les prochains jeux d'action. Sinon les corps épousent parfaitement les angles des murs, tandis que les cartons et autres chaises tombent lorsqu'on les heurte comme un gros goret. C'est sympa même si ça n'apporte pas grand chose, sauf quand une caisse tombe dans une cage d'ascenseur défoncée, moyen subtil de faire comprendre au joueur que la sortie n'est pas par là.

Légère chirurgie

Trois petites innovations et un ravalement de façade ne suffisent pas à faire une bonne suite, surtout que le jeu est toujours aussi court et de surcroît moins varié. Les environnements sont moins nombreux, les niveaux sont plus répétitifs et le jeu laisse un souvenir moins percutant que son prédécesseur qui avait pour lui l'avantage de la surprise. Il reste bien quelques gâteries à débloquer en finissant le jeu, comme un niveau de difficulté plus corsé ou des modes chronométrés injouables... Les nouveaux niveaux à télécharger, les Dead Man Walking, sont de plus de vulgaires arènes avec respawn infini d'ennemis. On en fait le tour en dix minutes. Bref, il manque clairement un mode multijoueur. En même temps, à part quelques niveaux un peu pénibles où il faut protéger un personnage qui joue en toute innocence les appeaux à balles, cette suite est quand même très prenante. Ralentir le temps en exécutant des pirouettes est vraiment terrible, surtout que les graphismes sont impressionnants pour ceux qui affichent 1,5 Ghz et une carte DirectX 8 au compteur. Ca suffit de justesse pour en faire un bon petit jeu, mais c'est clairement insuffisant pour en faire un grand bon gros jeu.
Les Plus
  • Réalisation somptueuse
  • Un gameplay en béton armé
Les Moins
  • C'est beaucoup trop court
  • Un scénario souvent grotesque
  • Pas de vraies nouveautés : c'est une version 1.5 ?
  • Un moteur physique redoutable mais mal exploité
Résultat

Le même, en un peu moins bien : voilà ce que donne ce Max Payne 2 au scénario acrobatique, aux niveaux répétitifs et à la durée de vie insignifiante. Cela dit, le charme opère toujours grâce à des moteurs graphique et physique impressionnants et à des voix extrêmement convaincantes. Le gameplay est solide comme un bon parpaing et c'est toujours un plaisir de doubler le cocktail Molotov qu'on venait de balancer en activant le Bullet Time : pour un peu, on se prendrait pour John Woo. C'est seulement ballot que le jeu ait conservé les défauts du premier opus sans de surcroît améliorer significativement ses qualités. En l'état, c'est un titre qui ressemble à une moitié de suite, une demi-portion facile à digérer et qui n'envoie pas en pleine poire le même crochet du droit que le premier opus.

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