Test | White Knuckle
03 mai 2025

L'escalade d'engagement

Testé par sur
White Knuckle

Un rogue-lite d'escalade, dans un univers sombre à la croisée de Silo et Half-Life ? Derrière ses décors monolithiques et sa palette de couleurs déclinant toutes les nuances de gris, voyons-voir ce que White Knuckle a dans les biceps. Et surtout, comment parvient-il à nous faire grimper de manière viscérale, encore et encore, toujours plus haut ?

L'histoire

Aller plus haut. C'est le motto qui accompagne votre fuite. Le jeu s'ouvre sur le coulissement sec du verrou d'une lourde porte métallique se refermant derrière vous. Le clang sourd résonne encore tandis que vous découvrez devant vous, au fond d'un silo, un mur avec quelques prises et un message écrit à la va-vite par certainement un précédent malheureux : Échappez-vous. Vous échapper de quoi ?

La diégèse est très subtilement distillée dans White Knuckle : nombreux sont les indices qui constituent le lore, sans jamais tout dévoiler d'un coup. Vous trouvez parfois des squelettes, assis sur une corniche, preuve que des grimpeurs sont passés par là avant vous avant d'abandonner à bout de forces... Les annonces audio, nombreuses et automatiques, témoignent également d'un environnement qui a connu une activité foisonnante. Non sans rappeler Portal 2, les annonces évoquent tantôt des zones n'ayant pas été inspectées depuis 3 000 ans, tantôt une cafétéria fermée pour cause de substance chimique inconnue... Clairement, quelque chose ne tourne plus très rond ici, et vous allez bien volontiers suivre le conseil inscrit au mur...
Le poing sur la situation

Le principe

Le saut de la foi.

Toute la mécanique de White Knuckle repose sur l'escalade en free climbing, c'est-à-dire sans attache ni assurance. À la force de vos deux poings, vous agrippez une prise rouge, bien visible, mais aussi un rebord de mur, une corniche, une grille, une caisse, un tuyau d'aération, n'importe quoi tant que votre main tient la prise. Avec un système de stamina, vous observez – et entendez – votre main tenir la prise un certain temps jusqu'à rougir à en devenir écarlate, un bruit de cuir tendu en prime. Il n'en faut pas plus pour comprendre qu'après, c'est la chute libre. Alors vous sautez, de prise en prise, jusqu'à atteindre une zone de répit où laisser vos mains se délasser (une boîte de conserve peut accélérer le process de récupération).

Mais la pause reste toujours de courte de durée. Car du fond du silo monte de plus en plus vite une masse, dont le but est de vous absorber. Pour les familiers de Blake et Mortimer, pensez à l'ennemi mouvant du troisième voyage du Piège Diabolique. Pour grimper plus vite, vous pouvez embarquer quelques précieux accessoires glanés en chemin : des barres à jeter, venant se ficher dans les parois et servant d'appuis, mais aussi une petite bestiole dont le jus vous permet de trouver des prises n'importe où, ou encore des pitons, à planter à l'aide de votre maillet. Leur utilisation est étonnamment bien retranscrite dans le jeu : la gestuelle main droite / main gauche est excellente, vous contraignant à tenir une prise d'une main tandis que vous plantez votre piton. Puis changez de main pour l'enfoncer de trois coups secs, avant que vos muscles ne se raidissent...
Atteindre le poing de non-retour

L'univers

Allez, on garde le rythme !

Derrière sa mécanique d'escalade, White Knuckle reprend en fait les bases du parfait rogue-lite : chaque partie redémarre au même endroit, la mort est souvent au rendez-vous (même si elle est évitable, aucune mort n'est punitive) et c'est l'expérience qui forge une meilleure endurance (non pas du personnage, mais de vous, joueur en sueur derrière votre écran). Car tout dans White Knuckle est fait pour vous encourager à vous dépasser. Le jeu vous indique régulièrement les paliers significatifs passés (50, puis 100, puis 200 mètres, etc.), enregistre vos moindres faits et gestes pour vous donner votre vitesse d'ascension, sans hésiter à vous afficher en pleine session votre record battu (bravo)...

Et quand vous effleurez des hauteurs jamais atteintes jusque-là, vos (vraies) mains crispées commencent à suer, votre regard devient fou et scanne les prises à toutes vitesse, vous parlez à voix haute, crachant des encouragements sur l'écran comme si vous étiez le témoin en direct de votre propre exploit. Quand la mort survient, le retour à l'écran titre n'est qu'une pause passagère. Car la réalité, c'est que White Knuckle appelle sans cesse à une nouvelle tentative, un nouveau round pour aller quelques mètres plus haut. Vous savez que c'est possible, vous l'avez déjà fait. L'irascible besoin de faire mieux, sans sauvegarde, free gaming, voilà ce qui vous anime.
Le poing culminant comme objectif

Pour qui ?

Le type a juste lâché l'affaire près du distributeur.

Ne vous fiez pas à son habillage faussement rétro mêlant textures dignes du moteur GoldSrc avec un effet dither, White Knuckle est un jeu du futur. Un futur délabré, à l'abandon, où clairement quelque chose a dérapé. Un Silo à l'abandon ? Peut-être. Pour les plus attentifs d'entre vous, difficile de passer à côté des nombreuses références à Half-Life, qui clairement, font plaisir. À commencer par les barnacles, qui sont les mêmes ennemis : ces sacs à viande laissant pendre des tentacules dans lesquelles il ne faut pas se faire prendre (quoi que...). Quelques messages audio, ou des atouts passagers font également référence au titre de Valve...

Si le doute vous habite encore et que vous craignez la monotonie, sachez que le titre propose une structuration habilement remodelée des niveaux à chaque partie : de légères variations des salles rendent le parcours presque unique à chaque tour. L'ensemble de ces détails prouvent que White Knuckle n'est pas un petit jeu anecdotique, loin de là. En témoignent les quelques centaines de joueurs connectés à toute heure sur Steam.
Question de poing de vue

L'anecdote

À chaque fois que je passe ici je pense très fort Kelly Malcolm dans Jurassic Park 2.

Je vais être franc : je n'aime pas le nom du jeu. Les articulations blanches ? Pourquoi ? Ce titre ressemble plutôt à un nom de code qui est finalement resté, par défaut. Ok, cela représente les mains à l'écran et toute la mécanique de stamina derrière, mais c'est très pauvre à côté de l'incroyable lore dont le studio a réussi à imprégner le jeu. À tel point qu'à chaque run, dans mes débuts, je découvrais (et je découvre encore) des nouveautés, que ça soit dans l'univers ou même les usages des objets proposés.

Je continue dans la franchise : je n'y croyais pas quand les notes accompagnant la clé de test indiquaient qu'il fallait une vingtaine d'heures pour réussir à sortir du silo. Bah en fait : si. Au début, je grimpais comme un escargot, cherchant à assurer chaque prise. Maintenant, je saute carrément des prises, je me projette avec assurance au loin. Mais je suis encore loin des cabris qui postent leurs exploits sur le Discord du jeu. Clairement, White Knuckle dégage une aura dont il est difficile de se détacher. Malgré mes échecs récurrents, je ne peux pas m'empêcher de remonter. Cela fait longtemps qu'un titre ne m'avait pas délivré de tels shots d'adrénaline.
Les poings sur les i
Les Plus
  • La mécanique main gauche / main droite
  • L'environnement comme terrain de jeu
  • L'ambiance générale, impeccable
  • Le son aux petits oignons
  • Les niveaux semi-génératifs
  • Les nombreuses références
Les Moins
  • Les atouts parfois déséquilibrés
Résultat

Quelle claque ! Malgré ses airs de fausse simplicité, White Knuckle se révèle d'une profondeur insondable. Profondeur dont il vous faudra vous extirper à la force des bras, en apprenant à maîtriser un environnement bétonné en décrépitude, habité d'un bestiaire hostile. La fluidité de la grimpette détonne avec l'aridité de son visuel. Avec un travail audio remarquable, le titre vous raconte une histoire éclatée, renforçant le sentiment d'urgence de s'échapper. Malgré sa difficulté certaine, White Knuckle réussit l'exploit de ne jamais vous faire lâcher. Inlassablement, vous irez grappiller les quelques mètres de votre record, jusqu'à espérer voir enfin la lumière du jour.

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