Test | RollerCoaster Tycoon 3 : Complete Edition
12 oct. 2020

Le plus grand parc de répulsion du monde

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RollerCoaster Tycoon 3 : Complete Edition

Rien que son titre laisse rêveur : RollerCoaster Tycoon 3 : Complete Edition vous promet des grands huit, des grands splash, des safaris animaliers, l'odeur du pop-corn et du supplément chantilly en prime. Mais avec un titre originellement sorti en 2004, l'excitation est-elle toujours au rendez-vous ? Ce portage Switch vaut-il de s'attarder des heures à régler de quelques degrés l'inclinaison de votre fantastique montagne russe ? Bouclez vos ceintures, ajustez vos lunettes anti-vomi, l'attraction démarre. Et en pente raide.

L'histoire

Le titre semble prolifique de prime abord : un mode scénario qui vous envoie dans de nombreuses contrées, affublé de deux extensions thématiques, l'une dédiée aux parcs aquatiques et l'autre aux enclos à animaux ; un mode bac à sable pour vous en donner cœur joie et dépenser sans compter ; et enfin un mode d'édition, pour créer des modèles de montagnes russes, de bâtiments ou même de visiteurs. Lâché dans cet ensemble de possibilités tel un enfant aux portes de Main Street U.S.A. à l'entrée de Disneyland, vous sélectionnez la première mission du premier scénario. Pour mieux comprendre que le scénario est plutôt un enchaînement de niveaux, sans réelle logique de progression autre que des objectifs chiffrés à atteindre pour déverrouiller la suite. Ces objectifs ont le mérite d'être clairs : augmenter la valeur du parc et le nombre de visiteurs. Lors de votre découverte du jeu, des bulles informatives vous expliquent le fonctionnement basique des différentes actions. Mais jamais sans réellement vous guider. Vous placez votre première boutique : un stand de boissons. Mais malheur ! Celui-ci tourne le dos au chemin pavé. Le retourner ? Impossible. Il ne vous reste qu'à le supprimer et le replacer en cherchant comment l'orienter. Et à tâtonner au hasard des menus.

Une fois vos marques prises et quelques attractions positionnées, vous vous étonnez de voir vos recettes en encéphalogramme plat. Normal : quand vous positionnez une boutique, un service, ou une attraction, même avec la file d'attente créée, vous devez manuellement l'ouvrir. Systématiquement. À ce moment là, vous comprenez que vous n'êtes pas là pour vous marrer dans RollerCoaster Tycoon 3 : Complete Edition. Non, vous êtes tombé dans une simulation légèrement tyrannique et totalement obsessionnelle des parcs d'attraction.
En Grèce, créez votre parc Athènes

Le principe

L'éternelle frustration : rien n'est bien calé.

Visualisez mentalement le cockpit d'un Boeing 747 et vous aurez une idée assez proche du fonctionnement de RollerCoaster Tycoon 3. Le titre semble avoir cumulé au fil des itérations et des add-on des idées, des fonctions, des personnalisations d'objets, pour les régurgiter dans un tout qui paraîtra attractif mais se révélera surtout indigeste. Et surtout, inexplicablement déséquilibré. Il vous est par exemple possible de personnaliser les couleurs des boutiques, et même des vêtements des visiteurs, mais vous ne pouvez pas repositionner l'entrée d'une attraction a posteriori. De même, vous pouvez modeler le terrain à souhait tel un promoteur immobilier pris de folie : montagnes, dépressions, canyons, tout est possible. Malheureusement, la maniabilité proposée rend ingérable la simple création de terrain plat. Inexorablement, vos chemins, circuits aquatiques et autres files d'attente se voient amputés de raccordements logiques, la faute à un terrain trop difficile à manœuvrer.

Ainsi, vous essuyez les échecs de construction, qui représentent une grosse part du jeu, avant de vous consacrer à la gestion générale du parc. Mais au fil des niveaux, quelque chose d'essentiel semble manquer à ce RollerCoaster Tycoon 3 : le fun. Cela vous marque d'abord lorsque vous voulez bâtir une nouvelle attraction : son descriptif est prolixe en données statistiques, en G absorbés par les visiteurs téméraires, en longueur, en hauteur... mais rien pour savoir si elle est plutôt amusante pour vos visiteurs. Mais surtout, c'est le fun de la progression qui vous manque cruellement. Les objectifs sont froids et chiffrés, vous progressez en gestionnaire-ingénieur, jamais sans que l'amusement, au cœur du concept de ce type de parc, ne vous effleure.
Pourquoi faire simple quand tout peut devenir compliqué

L'interface

Le jeu ne vous alertera jamais qu'il vous manque une piscine.

Dans cette édition Switch de RollerCoaster Tycoon 3, il aurait été légitime de s'attendre à une navigation au stylet, profitant de l'écran tactile de la console pour se rapprocher au mieux de la maniabilité à la souris pensée pour le titre. Mais il n'en n'est rien. Vous êtes enfermé dans un système de double molette, certes fonctionnel, mais d'une lourdeur incommensurable. Tout est rangé dans des sous-menus, que vous passez énormément de temps à parcourir, ouvrir, fermer, vous contraignant à réaliser une tâche à la fois alors que le jeu impose une certaine flexibilité. L'interface générale, largement datée, ne vous aide pas vraiment : tout a été pensé à l'époque où le menu déroulant était à la mode, réparti dans plusieurs menus aux onglets multiples.

La situation est ubuesque lorsque vous entrez dans le menu des employés : certes, le jeu apporte assez de finesse pour que chacun d'entre eux ait sa personnalité, sa flemme, sa motivation. Mais il vous est impossible d'accorder des formations à chacun d'eux sans effectuer une interminable série de 'flèche bas' sur votre Switch. Au dixième employé, vous abandonnez simplement cette tâche.

La palme revient aux notifications diverses, comme par exemple l'annonce de la découverte d'une nouvelle attraction : notification qui n'est évidemment pas cliquable pour accéder directement à son sous-menu. À vous en arracher les cheveux, le cuir chevelu, et la peau du visage qui vient avec.
Il vous restait des cheveux ? Parfait, vous allez pouvoir vous les arracher

Pour qui ?

Vu de loin, tout cela ne semble pas si mal.

Ne vous y méprenez pas : RollerCoaster Tycoon 3 : Complete Edition ne vous autorisera pas quelques parties de détente dans l'univers jovial et bon-enfant des parcs d'attraction. L'apprentissage pour le gérer est fastidieux, du fait d'une interface passée doublée de contrôles Switch peu avenants. Mais surtout, le titre s'adresse aux ingénieurs en herbe et apprentis sorciers de l'architecture, à la limite de la maladie obsessionnelle du détail absurde. Si sur le papier le jeu semble promettre autant de finesse dans les réglages, il fait clairement l'impasse sur le concept d'amusement, créant un déséquilibre qui vous laissera pantois. Même si le côté nerd de la construction de montagnes russes peut paraître séduisant, la lourdeur des contrôles vous empêche d'aboutir à quelque forme de satisfaction. Après avoir trimé sur la construction d'un roller coaster à votre image, sans réel succès, vous finissez par lâchement choisir des circuits tout faits, enlevant une grande part de la promesse du titre. Cette solution tiède sera le seul moyen pour avancer dans les niveaux.
Les montagnes russes les plus ennuyeuses du monde

L'anecdote

Pas plus haut que le bord, hein !

Je fais craquer mes doigts. Cette fois, je le fais. Je crée un roller coaster comme je l'ai en tête, avec des descentes folles, des virages serrés, des loopings qui s'enchaînent. Ma précédente tentative a été un échec cuisant, à tel point que j'ai rechargé une précédente sauvegarde tellement j'avais saccagé le terrain. J'avais fini par construire un circuit pré-conçu, où il ne reste plus qu'à relier la file d'attente. Mais même cela, je n'y suis pas parvenu. L'entrée de l'attraction étant située à 50 mètres de hauteur, il m'a fallu construire une file en escaliers. Mais je n'y suis jamais arrivé, la faute à un terrain trop accidenté pour que les blocs s'emboîtent correctement. J'ai bien essayé d'aplanir le sol en jonglant entre les menus de construction mais un coup de joystick un peu fort a créé une crevasse que je n'ai jamais su combler : c'est à ce moment-là que j'ai découvert l'absence tragique d'une fonction "annuler" dans le jeu.

Mais bref, revenons à mon bac à sable. Je pose la base, très bien. Puis une montée bien raide pour faire peur. Au huitième poteau, une fenêtre digne de Windows 95 s'ouvre : "Impossible de placer ici un morceau de tracé", affublée d'un bouton OK. OK. Pourquoi. Je fais quoi ? Je recommence. Je vais moins haut ; OK, j'avais atteint la limite du ciel. Je fais mes virages. Je fais simple cette fois, pas de looping, je veux juste boucler mon circuit. Non sans peine, sueur au front, visage crispé : j'y parviens. Oui. Je veux juste ajuster la hauteur de ce tronçon et... non ! J'ai sélectionné la base de l'attraction et l'ai supprimée en voulant la désélectionner. Et il n'y a pas de fonction "annuler". Je peux donc tout recommencer. Ou décider d'éteindre la Switch et de ne plus jamais lancer ce jeu maudit.
Fuyez, pauvres fous
Les Plus
  • Dans l'absolu, beaucoup de variété et de possibilités
Les Moins
  • L'interface globalement datée doublée de la lourde surcouche d'interface non-tactile de la Switch
  • Qui s'amuse à changer la couleur du tee-shirt des visiteurs ?
  • Bon courage pour créer un roller coaster avec cette maniabilité
  • L'absence de fonction "annuler"
  • De nombreux bugs non corrigés, plantant parfois la Switch
Résultat

Il ne reste plus beaucoup d'arguments positifs en faveur de RollerCoaster Tycoon 3 : Complete Edition. Le regroupement de ses extensions lui apporte certes une durée de vie plus qu'honorable, mais le titre est rattrapé par son âge et 16 ans, cela fait beaucoup. Vous aurez beaucoup de mal à naviguer dans les menus, du fait d'une adaptation ne profitant pas du tactile de la Switch, tandis que les enjeux des niveaux restent froids et dénués de saveur. Trop de choix tue le choix : perdu dans les réglages, vous pourrez vous réfugier dans une stratégie de surface, vous contentant d'utiliser les attractions et boutiques de manière standard sans vous abandonner dans des customisations sans fin. Mais cela ne sera à terme pas une option viable, tant les environnements vous poussent à enfiler votre casque de chantier, pour votre plus grand malheur. Enfin, sachez que le titre a été rendu un temps gratuit par l'éditeur sur PC, tandis qu'il vous en coûtera 30 € sur Switch : un choix qui ne plaide clairement pas en la faveur de ce portage.

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