Test | Grand Theft Auto V
25 oct. 2013

Juste un doigt ?

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Grand Theft Auto V

Après des années de développement et un budget astronomique, on se frotte les mains chez Rockstar : Grand Theft Auto V est le premier produit de divertissement à atteindre aussi vite le milliard de dollars de ventes. L'exploit est d'autant plus impressionnant que son interdiction au moins de 18 ans est censée réduire son champ d'action. Imaginez donc ses résultats sans ce cocktail sulfureux de violence et de sexe auquel la série nous a habitué. Impossible ?

L'histoire

Un père de famille ancien braqueur de banque, un pilote de chasse à la retraite psychopathe devenu toxico, un jeune gangster des quartiers chauds... Les trois protagonistes de Grand Theft Auto V trainent tellement de casseroles derrière eux qu'ils n'ont plus qu'une seule alternative : s'associer pour faire des braquages histoire de gagner facilement de l'argent, beaucoup d'argent. Le tout se passe dans un Los Angeles fantasmé en Los Santos, image assez décadente d'une Amérique de carte postale bien chiffonnée. Pop-corn et soda conseillés pour assister à du grand spectacle, même si cette histoire à l'issue qu'on devine tendue, et au second degré si subtil qu'il en devient difficile à cerner, ne prête pas forcément à la digestion.
God(e) bless America

Le principe

Des environnements réalistes et parfois majestueux.

On ne change pas un système qui a largement fait ses preuves. Grand Theft Auto V fonctionne donc comme ses glorieux aïeux, soit un jeu à la troisième personne dans un monde on ne peut plus ouvert et étendu. Vous disposez ainsi de près de 50 km² à explorer, à pied si vous êtes sportif mais aussi à bord de tout un tas de véhicules terrestres, nautiques et aériens, du vélo à l'hélico, en passant bien sûr par une multitude de voitures à personnaliser. En dehors de cette phase de tourisme, vous déroulez l'intrigue principale en remplissant de nombreuses missions plus ou moins variées. Elles nécessitent souvent une séquence de conduite laborieuse pour se rendre sur le lieu de l'action. Laborieuse car en plus de vous faire retraverser des zones que vous aviez sûrement déjà visitées en touriste, ces phases de conduite sont accompagnées de dialogues toujours non traduits donc sous-titrés. À moins d'être parfaitement bilingue (et drôlement accoutumé au langage imagé utilisé par les personnages), vous devez donc choisir entre suivre la conversation ou la route...

Mais bien au-delà de son scénario, Grand Theft Auto V est d'abord un jeu total dans lequel vous pouvez vous adonner à un nombre étourdissant d'activités. Les activités dites "classiques" comme la course automobile, le tuning, le shopping, le coiffeur, le tatoueur, le tennis, le golf, et d'autres qui le sont moins – en tous cas dans un jeu vidéo – telles que le yoga, le cinéma, le saut en parachute, la plongée sous-marine et... le club de strip-tease. Le tout est extrêmement étudié et les interactions lors de chacune de ces activités sont d'un tel niveau que, pour certaines, elles s'apparentent à des jeux à part entière. Cette exhaustivité contribue à rendre l'univers complexe et cohérent, elle vous donne l'impression d'évoluer dans un environnement crédible où votre capacité à choisir ce que vous allez bien pouvoir faire, et dans quel ordre, est mise à rude épreuve.
Un gros gâteau plein de crème

Le multi

Un "joli" tatouage pour faire oublier le slip kangourou ?

Rockstar a également mis le paquet sur le mode en ligne de Grand Theft Auto V. Il ne s'agit plus d'un mode mais carrément d'un jeu parallèle, sobrement intitulé Grand Theft Auto Online. L'intrigue principale est remplacée ici par un monde virtuel dans lequel vous pouvez évoluer librement en compagnie de 16 joueurs maximum en simultané. Le programme reste similaire au mode solo : courses, braquages, personnalisation, etc. Vous pouvez même vous acheter un appartement, condition sine qua non pour obtenir le numéro de portable d'une strip-teaseuse, par exemple. En pratique, ce mode multi s'avère bien sympathique – quoiqu'un peu bordélique – même s'il demande encore à évoluer pour rendre l'expérience optimale.
Un jeu de bandes

Pour qui ?

Les fans de la série Grand Theft Auto seront bien sûr aux anges, Grand Theft Auto V s'imposant comme l'épisode le plus complet et abouti sur tous les plans. Pour les autres, le jeu ne peut s'apprécier que si vous adhérez au parti-pris de Rockstar. En effet, cette ambiance sulfureuse, où violence, vulgarité et misogynie sont parfois poussés à leur paroxysme, le tout dans un environnement très réaliste où le second degré est difficilement perceptible, a de quoi déranger.
Un fan service au poil

L'anecdote

Les salles obscures : leur poésie vous reposera entre deux braquages.

Le monde ouvert de Grand Theft Auto V amène un bon paquet d'anecdotes plus ou moins croustillantes. La mienne ne l'est pas vraiment mais je vous en fait part quand même. Après une très longue virée dans Los Santos et ses environs, remplie de rencontres étonnantes, d'émerveillements (marrant le tour à la fête foraine), d'accidents routiers mortels pour les autres mais sans aucune conséquence pour moi, et évidemment de méfaits en tous genres, me voilà sur les collines qui surplombent la ville, un endroit qui rappelle Hollywood Sign. Je coupe le moteur, grimpe sur l'une des lettres du panneau et profite de la vue imprenable sur la cité. C'est beau, c'est vrai. Quel travail monumental accompli par les développeurs. Mais, au bout de quelques secondes, une question surgit brusquement : "Tout ça. Pour ça ?". Arrêt du système.
"Le monde est si grand Maman"
Les Plus
  • Un plateau de jeu énorme et réaliste
  • Un multijoueur étudié
  • Des activités très variées à la réalisation impeccable
  • Une bande son quasi parfaite
  • Les salles de cinéma : au moins un peu de poésie
Les Moins
  • Un scénario bourré de clichés
  • Toujours pas de localisation complète
  • Un second degré bien trop subtil
  • L'image assez dégradante donnée aux personnages féminins
  • Un libre arbitre artificiel qui conduit toujours à la violence
Résultat

Grand Theft Auto V est un peu comme un gros gâteau avec plein de bonnes choses à l'intérieur. Seulement, après quelques grosses bouchées, l'écœurement se fait sentir. À moins d'être un adepte de la série depuis toujours, l'expérience se révèle étrangement redondante et surtout dérangeante. Vous pouvez faire beaucoup de choses dans Grand Theft Auto V, mais mises bout à bout, elles se révèlent d'un intérêt limité. Vous pouvez également faire défiler un scénario à tiroirs mais dont les faiblesses sautent aux yeux si tant est que vous preniez le recul nécessaire. C'est vrai, comme souvent, Rockstar nous propose ici un produit techniquement très abouti qui peut griser. Pourtant, dès que vous posez la manette pour réfléchir 30 secondes à ce à quoi vous êtes en train de jouer, le fond nauséabond de Grand Theft Auto V se révèle. Bourré de clichés où violence et sexualité côtoient vulgarité et misogynie sans rougir, l'univers plutôt réaliste du jeu laisse un gout amer normalement incompatible avec l'idée de divertissement. Rockstar aura beau l'envelopper dans une bonne dose de second degré, sa subtilité parfois très pointue ne sera perceptible que par une minorité des joueurs qui auront mordu à l'hameçon.

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