Preview | Hitman: Contracts, ou les souvenirs d'enfance d'un tueur à gages
06 avr. 2004

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Hitman Contracts

Oublié, le côté militaire de Hitman 2 ! Et vive le retour aux sources d'Hitman: Contracts, qui renoue avec Hitman: Codename 47, premier volet de cette saga devenue un genre vidéoludique. Dans ce troisième épisode, action et infiltration sont habillement unies, à la troisième personne comme à la première, au choix, pour le plus grand plaisir du joueur. Car si éradiquer toute forme de vie peut être une solution, on peut aussi opter pour supprimer uniquement l'objet du contrat.

Mise en situation

Rappelons-le, pour les néophytes de la série, Hitman Agent 47 (c'est son petit nom) est le fruit d'une expérience génétique et a quelques problèmes de gestion des émotions. D'où son regard aussi froid qu'une pizza Picard quand il exécute son contrat. Bref, il est le tueur à gage hardis à qui on refourgue tous les contrats ardus. Dans Hitman: Contracts, tout commence dans une chambre d'hôtel miteuse de Paris, cernée par la gendarmerie. Notre héros est salement blessé, et il subit quelques évanouissements, durant lesquels il revit sa folle jeunesse, à savoir ses meilleurs contrats.

Voyage au bout de l’enfer

On bourlinguera donc en Sibérie, en Chine, en Angleterre, en Roumanie… tout ça sans quitter Paris. Sous forme de souvenir, donc, chacune des douze missions est introduite par une cinématique remettant le contexte en place. Et ça marche. On se laisse guider par cette humanisation du personnage, en proie à un étrange sentiment qu'est le remord. "Saperlipopette, ai-je eu raison de commettre tous ces forfaits ?" se demanderait-il presque. Les niveaux, bien que peu nombreux, révèlent l'attrait principal de Hitman: Contracts. Ce ne sont pas des niveaux, se sont des aires de jeu immenses. Jamais une telle liberté n'a été si perceptible dans un jeu d'action. En fait ce sont des quartiers de ville, de richissimes propriétés et autres bâtiments que l'on retrouve, un peu comme dans Hitman: Codename 47. On se mêle aux civils, on explore divers passages... Tout est fait pour que le joueur se sente libre d'opérer comme il le veut. Et là, les gars d'IO Interactive ont fait fort.

I’m not a bar code. I am a free man

Si vous avez regretté la linéarité de Splinter Cell et la boucherie redondante de Max Payne, vous allez adorer Hitman: Contracts. Chaque mission peut en effet être finie de dizaines de manières différentes ! Pas une seule partie ne se ressemble, c'est bluffant. Et pour cause : les moyens offerts au joueur pour remplir son contrat sont légion, et de plus l'interactivité des éléments, l'intelligence artificielle des personnages et les conséquences de vos actions modifient le scénario au fur et à mesure. Par exemple, dans une base militaire, pour exécuter tranquillement un type à l'abri des regards indiscrets, il est possible de trouver des laxatifs et de les balancer dans la marmite de soupe qui finira en partie dans son gosier. Reste à l'attendre planqué dans les chiottes, un pied de biche à la main. Autre exemple ; vous devez exécuter un type dans un hôtel de luxe. Soit. Vous avez à disposition un fusil sniper. Mais à l'entrée on vous confisque vos armes. Bon. Il va falloir en trouver dans l'hôtel. Ou alors liquider un garde pour piquer ses fringues. De là vous pouvez couper le système de sécurité du portique et récupérer le revolver que vous avez eu le soin de dissimuler dans la rue. Ou alors vous pouvez supprimer un serveur. Ou un groom. Ou alors vous faufiler sur les toits. Ou alors prendre l'identité d'un autre client. Ou alors… A cette foultitude de possibilités s'ajoute un élément majeur : les cibles sont mouvantes. Oui, il ne suffit pas de shooter un pantin à 600 mètres au snipe, il faut l'atteindre avant qu'il ne fasse autre chose. Ces gens ont des activités, que diable ! Ils vaquent sans se soucier qu'ils sont le seul objet des pensées de ce cher Agent 47.

Broie du noir, je te broierai la nuque

Le scénario de Hitman: Contracts se veut plus sombre que les précédents. Cela se ressent à travers le personnage, toujours aussi pro et détaché face aux victimes, mais aussi dans l'ambiance générale du jeu. Dans cette optique, le niveau de l'abattoir est particulièrement réussi. Flaques de sang et carcasses sont de rigueur, au milieu d'une fête SM orchestrée par un trafiquant obèse. Je vous conseille au passage de crocheter un boucher et de le suspendre à la chaîne de triage au milieu des carcasses... Ce n'est pas seulement exquis, c'est aussi utile pour stocker les cadavres dans la chambre froide. Côté matériel, Hitman est un vrai quincailler. Outre les armes à feu classiques, on retrouve la traditionnelle corde à piano. Efficace, silencieuse, elle garantit une mort propre et sans en informer les voisins. Mais dans les niveaux, le joueur peut trouver différents objets pas tellement anodins, comme une pelle, de l'essence, un oreiller (très fort le coup de l'oreiller : soit pour étouffer, soit pour s'en servir de silencieux), un crochet de boucher, une seringue de poison... Mais rassurez-vous, l'agent 47 dispose également de nombreux fusils d'assaut, snipers, mitrailleurs (même une roto !)...

Loup, y es-tu ?

Comme dit plus haut, Hitman: Contracts est un savant mélange d'infiltration et d'action. C'est assez cocasse de voir l'Agent 47 se pencher dans l'encoignure d'une porte pour ajuster sa cible. Mais la véritable force du jeu réside dans la grande interactivité avec le niveau. Ainsi on peut accéder à un endroit de plusieurs manières différentes, à chaque fois avec des obstacles variables. Si on déboule sur un balcon, mieux vaut rester incognito et attendre que la scène de ménage soit terminée en observant les personnages à l'intérieur de la pièce. Au contraire, si d'emblée on sort le péteux en flinguant tout ce qui bouge, la mission a de grandes chances d'être compromise. La tension est à son comble quand Hitman se cache et que des personnages ressentent la présence de quelqu'un. Chaque personnage a d'ailleurs une sensibilité différente. Un groom affolé ne verra pas le joueur dans un couloir éclairé par la lune. En revanche, méfiez-vous des chiens.

Le réalisme de l’hémoglobine

Certes, Hitman: Contracts n'est pas le jeu le plus beau de l'année. Cependant il jouit d'un certain nombre d'effets visuels plutôt réalistes, ce qui fait de ce jeu une simulation plutôt bien réussie. Essayez le shootgun au corps à corps… non seulement le sang montrera sa couleur mais le cadavre voltigera proportionnellement à la force du tir. Ce sont de nombreux petits détails qui font de ce jeu une réussite du genre. Rien que les cadavres méritent notre attention : les nerfs relâchés, il ne se laisse pas traîner si facilement. Une jambe qui traîne s'accroche à un pied de table, se déboîte, s'accroche à nouveau dans le battant d'une porte. Vraiment très fort ! On regrettera cependant l'absence de traînée de sang sur le sol, ou les pas de côtés étranges, comme si Hitman flottait... Mais face au potentiel du jeu, on ne peut qu'être impatient de pouvoir participer aux plus grands crimes de ce personnage dont le passé ressurgit et révèle d'ailleurs bien des mystères.

T’as vu ce hit, man ?

Un bon gros hit en perspective, alliant avec maestro furtivité, pugnacité et réflexion, dans un univers complètement libre autorisant des centaines de combinaisons d'actions.
Sortie le 30 avril 2004 sur PC, Xbox et PS2.
La GameCube est malheureusement écartée, "car pas assez rentable", selon les développeurs. Dommage.
Pour l'anecdote, plus de 50 personnes ont bossé sur ce jeu, autant que pour le premier volet. Et l'équipe est partante pour un quatrième opus d'Hitman, même si officiellement aucun projet n'a été lancé. Cependant, sachant qu'Eidos a acquis en mars le studio IO Interactive "afin d'assurer l'entière propriété de la licence Hitman", on peut éventuellemet s'attendre à une suite. Une source aussi juteuse que Tomb Raider ? A voir...
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Tribune libre