Test | Berserk and the Band of the Hawk
05 janv. 2017

La marque du sacrifice

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Berserk and the Band of the Hawk

Il s'en est passé des choses depuis la dernière adaptation de Berserk. C'était en 2004, sur PlayStation 2 et exclusivement au Japon. Depuis, le manga de Miura est devenu populaire dans l'hexagone, et ce malgré un rythme de publication toujours aussi sporadique. Cette fois-ci, c'est Omega Force qui se colle au travail d'adaptation. Un choix logique au regard de la violence du manga, mais The Band of the Hawk pourrait bien vous décevoir.

L'histoire

Impossible d'aborder l'histoire de Berserk en profondeur sans spoiler ce qui reste l'une des œuvres les mieux écrites de ces dernières décennies. Si vous n'êtes pas au courant, l'arc culte du manga est constitué des treize premiers tomes et s'apparente à un long flashback. Pour sa part, Berserk and the Band of the Hawk intègre des séquences animées issues des trois films produits il y a quelques années, et mettant justement en scène cette "introduction" redoutablement efficace et dramatique. Vous pourrez donc suivre les déboires de la Troupe du Faucon incluant notamment Guts (le héros), Griffith et Casca. Notez toutefois que le jeu ne se limite pas à la première partie du manga et vous permet d'enchaîner en suivant le fil de événements.
Un classique et un contenu généreux

Pour qui ?

Vous espériez une censure subtile ? C'est raté !

Le souci dans une adaptation de Berserk, c'est qu'il est assez compliqué de cibler les personnes n'ayant pas lu (ou vu) l'œuvre originale. Vous l'avez compris : les premiers tomes sont riches en révélations, et conseiller à un néophyte de faire le jeu directement reviendrait à lui dire de passer outre le plaisir de découvrir une œuvre majeure. De ce fait, le jeu se destine plutôt aux fans tout en étant sans cesse tirailler entre ses différentes ambitions. S'il inclut de nombreuses cinématiques servant à déployer son histoire, la narration prend souvent un air trop schématique. C'est d'autant plus vrai que Berserk est un manga particulier, débuté il y a une trentaine d'années et profitant d'un rythme de parution très aléatoire. Autant vous dire que les fans ont déjà eu l'occasion de relire ou revoir plusieurs fois les aventures de chevalier noir Guts, et qu'ils auraient peut-être préféré un titre qui sorte un peu de l'ordinaire plutôt que de ressasser sans cesse les vieux souvenirs.
Un jeu par décennie, donc bon

Le principe

L'intégration du canon de Guts est assez décevante.

Surtout que Berserk and the Band of the Hawk est assez décevant au niveau du gameplay. Vous vous retrouvez avec un Musou tout ce qu'il y a de plus banal. Et si Arslan avait le mérite d'être peu connu chez nous, il est regrettable qu'une œuvre telle que Berserk n'ait pas eu droit à plus d'attention. Nous nous retrouvons avec un jeu de commande, ni plus ni moins. Certes, l'univers se prête bien aux batailles à grande échelle, la troupe de Griffith gravissant notamment les échelons à l'aide de ses victoires sur le champ de bataille. Toutefois, le jeu n'utilise pas assez son matériel d'origine pour donner un réel intérêt à cette adaptation. Bourrin mais sans plus, le titre vous propose de marteler les touches d'attaque en attendant qu'une jauge se remplisse, ce afin de rentrer en transe et d'exécuter des coups spéciaux et ainsi de suite. Pour la structure, vous êtes aussi en terrain connu : commandant à éliminer, bases à récupérer, personnages à escorter, etc.

En dehors des coups spéciaux et de sa (jolie) galerie de guerriers (attention, tous ne sont pas jouables), Berserk and the Band of the Hawk ne propose pas grand-chose et ne joue jamais la carte du spectacle. Symbole de ce constat, l'absence globale de gore et de vrais démembrements (la faute à la censure). Pour un manga qui coupe des membres à la pelle – ou plutôt à la grosse épée – et multiplie les thématiques adultes, ça la fout mal. Plus pragmatiquement, ceux qui ont joué à l'adaptation PlayStation 2 se rendront compte, après avoir joué à ce volet PlayStation 4, que cette dernière faisait preuve d'une certaine audace à son époque. Rappelez-vous ses actions contextuelles (permettant par exemple de sauter sur des trolls pour les couper à la verticale) mais surtout ses combats de boss dynamiques et fidèles au manga (jusqu'aux axes de caméra). Ici, difficile d'être emballer par les affrontements spéciaux, finalement toujours dans la veine des autres productions du studio. De ce point de vue, nous sommes pas loin du désastre.
La bande des vrais c***

L'emballage

Comme dans d'autres jeux du studio, il est possible de récupérer de l'équipement et de l'améliorer.

Jouons les pisses-froids jusqu'au bout. Berserk n'a pas eu d'adaptation depuis treize ans, et nous devrions donc être emballés de voir un nouveau jeu débarquer sur PlayStation 4. Difficile néanmoins d'être convaincu par l'esthétique du titre, ici aussi en accord avec les dernières productions Omega Force, voire même pire. À défaut d'avoir des démembrements décents, le rendu du sang sur les vêtements des protagonistes (notamment lors des coups spéciaux) reste appréciable. En revanche, l'absence d'un thème du grand Susumu Hirasawa dans la bande originale est particulièrement déplorable.

Cet artiste au style si particulier a participé de près ou de loin à tous les travaux liés à Berserk jusqu'ici, de la série TV de 1997 à celle de 2016, en passant par les films (actuellement disponibles sur Netflix) et les jeux Dreamcast et PlayStation 2. Probablement pour des problèmes de droits, sachez aussi que les vidéos ont été expurgées de leurs musiques d'origine. N'espérez donc pas écouter Bloods and Guts, ni même avoir droit à des pistes en accord avec le ton si sombre et particulier du manga. C'est peut-être la plus grosse déception en terme d'ambiance.
Mauvaise ambiance

L'anecdote

Certains passages du manga se prêtent à ce genre. Hélas le résultat est souvent décevant.

Évidemment, mon pseudo n'est pas Griffith pour rien. Pourtant, quelle déception que ce nouvel épisode ! Ceux qui lisent les tests des Musou le savent : j'affectionne plutôt bien ce style de jeu et je ne manque jamais de souligner quand un épisode sort du lot. Hélas, difficile d'être emballé devant la fainéantise de ce volet, que ce soit sur le plan visuel (on est loin de Dragon Quest Heroes par exemple) ou sur celui du gameplay (Gundam 3). Ironie de la chose, c'est un jeu vidéo (celui ayant vu le jour sur Dreamcast) qui m'avait donné envie de découvrir l'univers déployé par Kentarô Miura.
Retour d'un apôtre conquérant
Les Plus
  • La découverte des combattants et des coups spéciaux
  • Les cinématiques animées (encore que)
  • Un contenu "facile" mais globalement généreux (durée de vie, nombre de protagonistes, etc.)
Les Moins
  • Graphiquement très décevant
  • Des musiques à l'ouest
  • Originalité zéro
  • Les problèmes d'un Musou (narration, chevaux, intelligence artificielle, etc.)
  • L'impression d'un très, très gros gâchis
  • Certaines missions méritaient assurément mieux
  • Une durée de vie parfois inutilement artificielle (sachant que le jeu était assez long à la base)
  • La censure, sérieusement ?
Résultat

Ni un bon Musou, ni une bonne adaptation, Berserk and the Band of the Hawk est un jeu de commande parmi d'autres. Il s'agit même d'une cruelle déception pour les fans ayant joué aux précédents titres estampillés Berserk, et qui n'ont que trop rarement droit à un épisode vidéoludique. Le résultat est d'autant plus regrettable que le manga de Kentarô Miura se prêtait plutôt bien à l'exercice Omega Force, pour peu que des efforts eussent été consentis. En fin de compte, les seuls qui pourraient être convaincus par Berserk and the Band of the Hawk sont ceux qui n'ont jamais touché à un Musou de leur vie. En 2017, c'est rare. Du coup, retournons lire ou voir pour la millième fois cette oeuvre culte, tout en espérant que la prochaine adaptation sera meilleure.

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