Test | Mighty n°9
05 juil. 2016

Beck, verseur de larmes

Testé par sur
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Mighty n°9
  • Éditeur Deep Silver
  • Développeur comcept
  • Sortie initiale 24 juin 2016
  • Genres Action, Plateformes

Fort d'une campagne Kickstarter financée à hauteur de 400% et après des retards successifs s'étalant sur plus d'un an, Mighty n°9 arrive enfin. Voyons donc ce que donne ce jeu apparu sur le site de financement participatif en 2013.

Avant-propos

Keiji Inafune est souvent associé à de grandes licences japonaises telles que Megaman ou Onimusha. Si bien qu'un véritable imbroglio s'est constitué autour du monsieur. Pour s'en rendre compte, il suffit de voir quelques pages internet dédiées à son parcours. Si certaines le placent comme "concepteur" de certains titres, d'autres plus précisent révèlent bien souvent le pot aux roses. Ainsi, le directeur du premier Dead Rising n'est pas Keiji Inafune mais Yoshinori Kawano (qui a aussi co-dirigé certains Megaman Zero, autre jeu auquel Inafune est souvent crédité comme créateur...). D'ailleurs, si on lui accorde la co-paternité de Megaman ou encore l'affiliation au premier Street Fighter, Keiji Inafune s'est souvent cantonné au statut de designer, s'occupant parfois de certains personnages ou de certains décors (c'est notamment le cas pour Street Fighter). Si tout cela peut sembler anecdotique, vous allez voir que tout ces éléments ont leur importance.
Cash Investigation

Le principe

Le doublage est catastrophique, les lèvres ne bougent pas et a t-on besoin de parler du design ?

Car tester des jeux vidéo, c'est aussi se rendre compte, au fil des tests, qu'il y a parfois de grosses mascarades qui s'installent. Ainsi, le secteur des jeux dis indépendants nous laisse parfois son lot de questions. Il n'est pas rare par exemple, entre membres de la rédaction, que nous soyons plus ou moins surpris par quelques titres s'inspirant sans vergogne de jeux cultes, allant alors jusqu'à les "pomper" sous couvert d'hommage. Si certains tolèrent cette façon de faire (voir le test de Oceanhorn), d'autres sont bien plus sceptiques. Que dire, donc, d'un jeu comme Mighty n°9, pour lequel la mascarade est carrément orchestrée par un nom "connu" du milieu.

Financé via Kickstarter, Mighty n°9 pousse le bouchon étonnamment loin. Car en plus de copier Megaman sous couvert de "j'ai participé à la série", Keiji Inafune et son équipe livrent une bien pâle copie, probablement en deçà de ce qu'aurait produit nombre de développeurs indépendants s'ils avaient eu la même impolitesse vis-à-vis de Capcom. Pour faire simple, vous incarnez Beck, le Mighty n°9 qui doit affronter les autres Mighty et les ramener à la raison pour sauver le monde. Si le scénario est minimaliste, il est en plus mis au dernier plan par un manque d'effort évident au niveau de l'emballage (les graphismes sont médiocres et le design n'atteint jamais le modèle de Capcom).

Mais le pire, c'est sans conteste le manque d'attention portée au gameplay. Mighty n°9 reprend évidemment le principe de Megaman (comment aurait-il pu en être autrement étant donné le design ?), avec un héros pouvant sauter, tirer devant lui et affronter des boss caractéristiques. Ici, l'idée est surtout de réaliser des "dash" afin d'absorber l'énergie restante des ennemis affaiblis, cela afin d'améliorer votre score en effectuant des combos. Le souci, c'est que ce système de scoring relativement alléchant sur le papier est rendu caduc par une jouabilité calamiteuse. Jamais précis, le jeu pâtit autant de la gestion des sauts que de celles du dash. En résulte une frustration omniprésente et la sensation de ne jamais être totalement maître du personnage.
Beck l'impuissant

Pour qui ?

Détail insupportable : mourrez et le jeu mettra quelques temps à recharger le checkpoint. Courage !

Tout d'abord, ayons une pensée pour les personnes ayant participé au financement du jeu et qui, au vu du résultat, ne sont probablement pas près de se reconnecter de sitôt sur Kickstarter. Les autres joueurs peuvent pour leur part passer leur tour sans sourciller. C'est d'autant plus vrai que le modèle du jeu (Megaman) est disponible dans une collection à petit prix, et que Capcom a même eu la bonne idée de mettre celle-ci en promotion sur le PlayStation Network jusqu'au 14 juillet.
Pas folle la guêpe !

L'anecdote

Beck peut prendre plusieurs formes mais l'incidence sur les niveaux est plus que discutable.

Ce qui est drôle, c'est que malgré l'omniprésence de Keiji Inafune pour parler de Mighty n°9, celui-ci n'est toujours pas crédité en tant que directeur. En se penchant sur les crédits du jeu, je me suis rendu compte que le japonais a participé à la production et à l'écriture du jeu. Une vaste plaisanterie compte tenu du scénario ridicule de Mighty n°9. Plus intrigant, je me demande pourquoi ce type de jeu n'est jamais poursuivi pour plagiat. À moins que la définition de celui-ci diffère sensiblement d'un pays à un autre (en France, il s'agit bien de la façon dont une idée est exploitée, et non de l'idée elle-même). Ici, nous sommes quand même très proche de cette définition, que ce soit au regard du gameplay, du design ou autre. Sauf si Capcom a senti que ce nouveau studio se tirait lui-même une balle dans le pied ?
Et la notion de plagiat dans tout cela ?
Les Plus
  • Rien, c'est une évidence
Les Moins
  • Un emballage médiocre
  • Une jouabilité qui manque terriblement de précision
  • Un level design paresseux
  • Un jeu ridiculement punitif compte tenu du manque de calibrage du gameplay
  • Une durée de vie très artificielle
  • Des détails particulièrement frustrants (les micros temps de chargement entre les morts, etc.)
  • Un jeu porté par un "créateur" qui singe autant son modèle... une sacrée odeur de plagiat
Résultat

N'ayons pas peur des mots : Mighty n°9 est un scandale comme nous en voyons rarement. En plus de singer une licence célèbre à coups de millions d'euros récupérés sur Kickstarter, le jeu s'avère être tout bonnement catastrophique. Pâtissant surtout d'une jouabilité exécrable (et d'un emballage aux fraises), on en vient à se demander comment un tel jeu à pu coûter si cher et bénéficier d'une gestation aussi longue. Autant être clair : nous doutons clairement de la bonne foi du développeur dans cette histoire, et de la possibilité qu'une équipe (même très réduite) puisse mettre trois années pour produire une expérience si décevante. À défaut d'être un bon petit jeu, Mighty n°9 est avant tout la parfaite définition du mépris.

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