Test | Vampires Bloodlines : du sang et des larmes
26 janv. 2005

Testé par sur
Bloodlines

Si vous êtes convaincu qu'un vampire se doit de ressembler aux créatures de Buffy, que votre super héros préféré s'appelle Blade et que vous avez vu Van Helsing aussi souvent que Titanic, nous ne pouvons rien faire pour vous. Si par contre vous êtes convaincu qu'Anne Rice a écrit une étude très sérieuse sur la culture vampirique et que le Dracula de Bram Stocker n'est qu'une tentative pour cacher la vérité aux yeux des humains, vous êtes fin prêt pour lire ce test. Approchez mortels, l'heure de l'ultime étreinte est enfin arrivée.

Vampire, vous avez dit vampire ?

Oubliez tout ce que vous avez toujours cru savoir sur les vampires, toutes les légendes que l'on nous a racontées dans de nombreux films, tout cela n'est que du vent. En fait, les vampires vivent plutôt comme nous, ils forment une société organisée régie par de nombreuses règles. Enfreindre l'une de ses règles a d'ailleurs souvent des conséquences néfastes sur l'espérance de vie des suceurs de sang. Ainsi le joueur venant tout juste de subir l'étreinte faisant de lui un vampire apprendra-t-il très vite ces règles élémentaires principalement destinées à cacher aux humains l'existence d'une espèce supérieure (que l'on appellera Mascarade) tandis que la politique lui sera contée en douceur. Chaque chapitre du jeu introduira son lot d'éléments sur le mythe des vampires et l'univers crée par Whitewolf. Au commencement, le joueur est plutôt tranquille, on vous demandera juste de choisir un clan parmi les neuf jouables, déterminant ainsi vos pouvoirs de vampire et pour les cas les plus extrêmes (les Nosferatu notamment) votre façon de jouer, le tutorial se chargeant ensuite des bases à connaître : se nourrir, rester furtif et utiliser ses pouvoirs.

Evolution libre

C'est ce qu'on appelle avoir les crocs

L'évolution de notre suceur de sang reste très libre, les attributs et capacités du vampire étant suffisamment vastes pour s'adapter à votre façon de jouer. Le joueur discret privilégiera le crochetage et le piratage, le gros dur jouera sur l'intimidation tandis que le plus raffiné misera sur son pouvoir de séduction. Il existe donc de nombreuses manières de conclure une majorité de quêtes, la distribution de l'expérience n'avantageant pas le tueur en série puisque seule la résolution d'une étape de votre quête rapportera les précieux points qui vous permettront d'évoluer. Pendant le jeu, votre statut de vampire, être pratiquement immortel en théorie mais plutôt fragile en combat dans la réalité, vous imposera de surveiller deux ou trois petits détails. Votre besoin de sang sera le plus important de ceux-ci car c'est lui qui vous permettra d'utiliser vos pouvoirs de vampire. Combler ce besoin vous obligera à vous nourrir d'humains bien sûr, mais aussi d'animaux ou d'autres sources qu'il vous faudra découvrir. Autre point à garder en mémoire, votre humanité détermine votre contrôle sur la bête qui sommeille en vous. Laissez la prendre le contrôle et vous deviendrez surpuissant mais sans le moindre contrôle sur vos actes, mettant ainsi en péril la Mascarade. Tuer sans raison, pour se nourrir ou pour une autre raison n'est donc pas une action à prendre à la légère.

JC Denton chez les vampires

Faudra prévenir les pompiers

Ne pensez pas avoir devant vous une adaptation fidèle du jeu de rôle papier, c'est plutôt à Deus Ex que le nouveau jeu de Troika fait penser. Comme dans le jeu d'Ion Storm, on retrouve le mélange action/FPS/RPG mais sans que l'alchimie fonctionne aussi bien qu'on ne l'aurait voulu. Les phases FPS se révèlent en effet au mieux imprécises lorsqu'on utilise une arme à feu (le recul de certaines armes étant tel qu'on visera les pieds de la cible pour lui mettre une balle dans la tête) et bien confuses pour le corps à corps tant on manque parfois de repères visuels. Autre point gênant des combats, on remarquera vite qu'un vampire équipé d'un simple couteau est plus efficace qu'un autre manipulant un Uzi, surtout pour faire le ménage dans une pièce surpeuplée. Quant à l'aspect RPG, il est fortement dilué dans une histoire qui mélange volontiers mythologie, théologie et philosophie avec un univers déjà suffisamment riche pour servir de base à plusieurs jeux. On se contente donc de suivre les évènements, ce qui s'avère suffisant pour trouver la plupart des quêtes annexes, plusieurs quêtes se recoupant d'ailleurs pour ne plus faire qu'une (le tueur en série en est une bonne illustration).

Troika style

Au moins, Vampires fait de la pub...

Malgré ces premiers défauts, on se laisse facilement prendre au piège, car s'il y a bien un point que Troika a réussi dans ce titre c'est bien créer des ambiances convaincantes. Nombre de joueurs se souviendront longtemps d'une mission dans un hôtel hanté où le moindre objet est susceptible de se transformer en projectile et où l'un ou l'autre fantôme tentera de vous aider ou au contraire de vous convaincre de prendre la sortie la plus proche. Les autres quêtes se montrant suffisament variées pour qu'une ambiance réussie succède à un passage un peu plus lourd. Au côté de ces ambiances, on retrouve également la touche du développeur dans les dialogues, humoristiques souvent (il faut voir son petit vampire demander un missile nucléaire à un trafiquant d'arme), adulte aussi dans des sous-entendus souvent très clairs. On remarquera au passage que le jeu dispose d'une version originale mal sous-titrée, certaines phrases étant complètement oubliées dans les dialogues tandis que les messages des répondeurs ne seront que rarement traduits. Mais aux côtés de ces petits défauts mineurs, on retrouve malheureusement l'autre spécialité de Troika : les bugs en tout genre.

La Source de bien des soucis

Le seul intérêt du Source Engine

Il faut se souvenir que ce Vampire: The Masquerade – Bloodlines est le premier jeu réalisé par Troika avec un vrai moteur 3D. Le manque d'expérience dans le domaine des codeurs de la société se révèle criante tant le nombre de défauts techniques est impressionnant. Parmi les moins graves, on remarquera que le vampire sait voler, puisqu'il n'est pas nécessaire de garder un contact direct avec le sol pour éviter une chute lorsqu'on se trouve en hauteur. Ajoutons des soucis d'animation (la descente d'un escalier est tout sauf réaliste et nous n'insisterons pas sur l'animation du vampire montant une échelle alors qu'il est à l'arrêt). Autre déception, le moteur physique, pourtant parfaitement au point dans Half-Life² dont Vampires partage le moteur, est ici ridicule. Si l'on peut se saisir d'un objet pour distraire un ennemi, il arrive également très souvent que nos déplacements soient entravés par une simple planche de bois que l'on a posée par terre. Les collisions des ennemis avec le décor ont également quelques soucis à se faire, puisque l'on réussira parfois à tuer quelqu'un à la batte de base-ball juste en le frappant sur les 5 pixels dépassant d'une porte fermée.

Troika de malheur

La bonne blague du miroir qui réfléchit les cadavres...

Le pire est pourtant encore à venir et la question de la pertinence quant au choix du Source Engine se pose très vite. Certes, le moteur d'Half-Life² permet des animations faciales impressionnantes qui servent un jeu de rôle, mais le moteur souffre ici de nombreux ralentissements. Ce qui n'est pas sans conséquence, les quartiers d'une ville comme Los Angeles ressemblent souvent à quatre pauvres rues se battant en duel, la plage de Santa Monica est plus proche du bac à sable que de Malibu tandis que les boîtes de nuit et autres clubs sont souvent de taille réduite et passablement sous-peuplé. Les graphismes oscillent entre le tout juste joli et le vraiment banal, rien qui justifie de tels ralentissements donc. Quant aux habitants, on les classera vite en trois catégories : vampires ou autres créatures similaires, simples éléments du décor et nourriture potentielle. L'I.A. de tout ce beau monde étant d'ailleurs des plus simplistes, on rencontrera des adversaires incapables de passer sous un obstacle pour atteindre le joueur comme des flics qui vous oublieront très vite alors que vous venez de tuer un passant sous leurs yeux.
Les Plus
  • L'ambiance
  • Les dialogues, surtout chez les Malkaviens
  • L'humour très présent
  • Beckett, Jeanette, Velvet et les autres
Les Moins
  • Ils jouent à leurs jeux chez Troika ?
  • Pas à la hauteur des attentes des joueurs
  • C'est très petit, Los Angeles...
  • La traduction, loin d'être parfaite
Résultat

Par bien des points, Bloodlines déçoit et Troika énerve même le joueur le plus patient (un bug majeur dès l'écran de création du personnage, il fallait oser). Le potentiel est là, mais on a l'impression que Troika s'est concentré sur l'ambiance et l'univers (on croisera d'ailleurs l'une ou l'autre célébrité du jeu papier, dont l'une qui risque de faire hurler les puristes) et a raté l'immersion. Une ville de Los Angeles ridicule, la nuit continue (alors que la présence du soleil aurait pu apporter un peu plus de profondeur à l'existence du vampire) et divers autres détails (les miroirs notamment) rendent le jeu commun. Il n'en reste pas moins que les joueurs réussissant à passer outre les défauts et les trop nombreux bugs du jeu s'offriront une expérience qui changera beaucoup du classique elfe/nain/dragon mais qui laissera un arrière goût de pas fini. Un jeu en demi-teinte donc, à réserver aux fans mais à déconseiller à tous ceux ayant encore un tant soit peu de confiance en Troika et qui voudraient croire que les derniers ratés de la société étaient dû à l'éditeur.

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