Test | Yakuza à la rue
07 nov. 2006

Testé par sur
Ryu Ga Gotoku
  • Éditeur SEGA
  • Développeur SEGA
  • Sortie initiale 15 sept. 2006
  • Genres Action, Aventure

Difficile d'oublier les promesses de liberté de jeu entrevues à l'annonce du titre, mais il faut se faire une raison : Yakuza n'a rien à voir avec un GTA à la japonaise ni avec un Shenmue. Sega propose plutôt une revisite du genre "jeu de baston" pur et dur, le tout dans un enrobage à la sauce teriyaki. Le titre n'est forcément de tous les goûts.

Pas de crime mais du châtiment

Kiryu Kazuma sort tout juste de prison, où il a purgé une peine de dix ans pour un crime qu'il n'a pas commis. Non pas qu'il soit tout blanc, loin de là. Il fut même l'une des étoiles montantes de la mafia japonaise, les yakuza. Aujourd'hui, il reprend sa carrière en main et reconstruit sa réputation en tâchant de retrouver les personnes qu'il a couvert. Cela l'amène dans un complot de très grande envergure dans lequel les familles yakuza les plus éminentes se trouvent impliquées, ainsi qu'une jeune fille nommée Haruka qui l'accompagne. De tout cela s'il ne fallait retenir que trois choses, ce seraient les suivantes : vous interprétez un yakuza classe et balèze ; au centre de l'histoire, il y a la rondelette somme de 100 millions de dollars à récupérer ; vous avez à dos tous les pires malfrats de la ville. Le cadre est posé, vous pouvez vous lancer à corps perdu dans Tokyo en prenant garde à chaque coin de rue. Vos ennemis sont bien plus nombreux que vous ne l'imaginez et l'apprentissage des bonnes manières occupera le plus clair de votre temps. Bienvenue au pays du soleil levant, version "reservée aux plus de dix-huit ans".

Des combats sans merci

Dans les combats à plusieurs il faut réussir à isoler ses adversaires.

Il faut vous y faire : la vie d'un yakuza implique de jouer des coudes. Le jeu consiste en une série de combat dans lesquels tous les coups sont permis. Eclatez la tête de vos adversaires contre un mur, piétinez lui le visage de votre talon et surtout ne perdez pas une occasion de le démolir avec le moindre objet à portée de main. Tout se joue à ce niveau, empoignez enseignes publicitaires, clubs de golfs et autres bicyclettes pour corriger du malfrat. Plus vous frappez, plus votre jauge de rage augmente et vous permet de lancer des attaques capables de mettre au sol les adversaires en un coup. Chaque victoire vous apporte des points d'expérience pour augmenter votre vie, débloquer des nouveaux coups, etc. Mais au final ce sont les armes qui font la différence et la signature particulière du titre. Sur ce plan, la concurrence avec Dead Rising est déloyale : l'éventail d'armes improvisées est vaste dans Yakuza mais n'arrive pas à la cheville du jeu de zombie de Capcom, référence en la matière. De plus les combats impliquent des temps de chargement tellement longs que l'enjeu est de les éviter à tout prix pour ne pas casser le rythme. Il faut s'accrocher : ce n'est que lorsque vous parvenez à vous débarrasser des malfrats bloquant votre route que vous disposez d'un court laps de temps pour baguenauder.

Sinon y a quoi à faire en ville ?

Les armes se brisent rapidement, ce qui incite à en changer souvent.

Les divertissements d'un yakuza sont malheureusement rares : entraînement de baseball, machines à sous, shopping... Rien de très captivant. Au final, deux choses seulement comptent véritablement : l'alcool et les femmes. La dégustation de spiritueux, toute bête dans son principe, propose de longues descriptions très précises de la saveur de chacune des liqueurs. C'est idiot mais c'est aussi l'aspect du jeu le plus dépaysant. Une fois bien chauffé, passez faire un tour dans un club d'hôtesses ou vous débourserez une fortune pour flirter avec les minettes du lieu. La conversation se présente sous la forme d'un QCM où il vous faut deviner la réponse la plus à même de séduire votre interlocutrice. C'est finalement le meilleur prétexte à discuter avec les gens en ville : les hommes sont tous amoureux de ces filles et ils vous donneront des informations sur leur goûts et leur personnalité. C'est vain, certes, mais c'est finalement ce qu'il y a de mieux à faire en ville. Il est décevant de voir qu'il n'y a pas de borne d'arcade comme dans Shenmue permettant cette mise en abîme délicieuse. Le temps n'est plus au recyclage gracieux des anciens titres de l'éditeur, rééditions collectors et Console Virtuelle de la Wii oblige.
Les Plus
  • La violence des combats
  • Le scénario digne d'un bon film de genre
  • La bande-son très soignée
Les Moins
  • Beaucoup trop répétitif
  • Manque d'immersion dans la ville
  • Le système de point de passage empêche de rassembler ses forces avant de retourner au combat
Résultat

Désabusé, vous vous laisseriez volontiers aller à la mélancolie en errant dans les rues. Mais il n'y a rien à faire, pas moyen de traîner sans se faire aborder par un pénible. L'ennui rend violent paraît-il. Yakuza dévoile que même la violence peut devenir ennuyeuse. De toute évidence, le projet a subi les conséquences d'une ambition trop élevée. Les allers-retours dans les rues étriquées d'un Tokyo miniature ne développent pas d'atmosphère. Le souvenir de Shenmue est encore vivace cinq ans après : ses protagonistes uniques, sa musique grandiose et la qualité des graphismes laisse imaginer ce dont Sega aurait été capable si Yakuza avait eu la même ampleur. Même le système de combat, censé être le cœur du jeu, déçoit en perdant en grâce ce qu'il dégage en agressivité. Au final, seul le scénario et la qualité des cinématiques insufflent de la noblesse au titre. L'incapacité à faire vivre par le gameplay l'existence d'un yakuza se traduit par le recours aux cinématiques, ce qui est l'aveu indirect de l'échec du jeu. Ceux qui recherchent un jeu de baston bien emballé y trouveront éventuellement leur compte. Les joueurs privilégiant le dépaysement passeront ce volet et surveilleront éventuellement Yakuza 2, déjà sorti au Japon. Peut-être le tir aura-t-il été rectifié ?

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Tribune libre