Test | Might & Magic VIII
23 mai 2000

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Might & Magic VIII

Après un Might and Magic 6 techniquement daté mais avec un scénario béton et un bon gameplay, après un Might and Magic 7 techniquement encore plus daté, un peu plus joli, avec un très bon scénario bien que plus court et plus facile, Might and Magic 8 se présente comme une troisième déclinaison du même système et moteur de jeu, daté au-delà des mots, un scénario encore plus court, encore plus simple, mais cette fois, en plus, sans grande originalité. La recette commence à sérieusement s'affadir, en particulier si on considère les faiblesses du jeu.

Une suite sans grand rapport.

À nouveau jeu, nouveau continent, nouvelle histoire, nouvelle... euh non rien, nouvelle histoire, c'est bien de s'arrêter là. Might and Magic 8 se déroule sur Jadame, troisième continent avec ceux d'Enroth (Might & Magic 6) et d'Erathia (Might & Magic 7) constituant le monde d'Enroth (oui, comme le continent et comme le royaume situé dans le continent). Si vous n'avez jamais entendu parler de ce continent dans les deux précédents volets, ce n'est pas grave, aucune relation n'est faite entre le scénario de MM8 et ceux des deux épisodes précédents jusqu'à la toute dernière partie du jeu, d'un point de vue purement narratif, sans la moindre influence sur le déroulement du jeu lui-même. Les fans de la série qui s'attendaient à voir une suite aux histoires des dynasties Ironfist et Gryphonheart pourront être déçus, mais pour les nouveaux arrivants qui ne connaissent pas encore la série, aucun problème ne se pose.

Faisons simple.

Le scénario se résume assez simplement (mauvais présage). Devant les conflits perpétuels entre les différentes races, une ancienne prophétie transmise chez les Dark Elfes se met en route. Un étrange personnage, Escaton le Destructeur (Destroyer en VO, d'où le titre) débarque dans la ville de Ravenshore située au coeur de Jadame. Il fait apparaître un énorme cristal au centre de la ville, après quoi quatre portails s'érigent aux quatre coins du continent, chacun ouvrant une porte vers un plan élémentaire (air, terre, feu, eau), provoquant des cataclysmes dans les régions avoisinantes et relâchant des hordes d'élémentaires vers le cristal de Ravenshore. D'après la prophétie, lorsque les quatre éléments se seront rejoints, le monde sera détruit et tout recommencera à zéro. Où se situe le joueur dans cette histoire digne de l'Arche de Noé? Il s'agit d'un mercenaire contacté par la guilde des marchands d'Alvar pour s'assurer de la protection d'une importante caravane de marchandise. Évidemment les choses ne se déroulent pas tout à fait comme prévu et il se retrouve bloqué sur l'île de Dagger Wound en plein milieu d'une attaque de pirates.
Les habitués de Might and Magic devraient déjà avoir remarqué une différence notable d'avec les précédents épisodes: le jeu ne commence pas avec la création d'une équipe anonyme dans une taverne puisque le héros principal est défini par avance. Le système de création d'équipe se trouve donc remplacé par un système de création d'un personnage unique, identique au système de Might & Magic 7 si l'on excepte l'absence d'équipiers. Vous choisissez donc un nom, une race, un visage, une voix, une classe, répartissez les attributs et les aptitudes de départ et hop, direction Dagger Wound Island pour débuter la partie... en solo. Le système de création d'équipe n'a en effet pas seulement disparu du démarrage de la partie mais aussi des tavernes. Impossible de créer de nouveaux personnages pour vous accompagner, il vous faudra les recruter. Vous rencontrerez donc en cours de route certains PNJ qui accepteront de vous rejoindre (ou qui refuseront en attendant que vous ayez un niveau suffisant, certains continueront d'ailleurs de vous considérer comme inférieurs même après que vous avez sauvé le monde, allez comprendre).

Engagez-vous qu'ils disaient.

C'est une nouveauté par rapport à MM6 et 7 alors on ne va pas trop s'en plaindre, vu comme elles sont rares. Précisons simplement que ce n'est pas non plus un changement énorme -- une fois votre équipe au complet, vous ne devriez pas être très chauds pour changer un personnage puisque ceux qui se présentent ont de grandes chances d'être d'un niveau équivalent voire inférieur, sans matériel correct ni aptitudes très développées. Deux exceptions sont à noter, la première étant un Dragon qui vous rejoindra lorsque vous explorerez Garrote Gorge, Dragon qui gagnera la partie pour vous (nous y reviendrons), et Blazen Stormlance, chevalier que vous sauverez au cours d'une quête et qui proposera de vous rejoindre à un moment où vous serez très probablement d'un niveau bien inférieur au sien. Autrement dit 'gros perso de la mort veut rejoindre petite équipe faiblarde pour l'aider à buter tout le monde'. Ça ne se refuse pas. Au passage, notons que l'équipe peut contenir cinq aventuriers, ce qui est mieux que les quatre de MM6 et 7, mais toujours moins que les cinq premiers épisodes qui pouvaient en avoir six.

Un peu de sang neuf.

Toujours au niveau de la composition de l'équipe, une autre nouveauté de MM8 fait son apparition: de nouvelles races et classes. Jadame étant un continent sur lequel de nombreuses races sont mélangées, on se retrouve avec des Minotaures, Trolls, Dark Elfes, Vampires et Dragon (notez le singulier, vous ne pourrez en recruter qu'un seul et vu la puissance de la bestiole, c'est déjà trop). En revanche, les races qui étaient (ré)apparues dans MM7 sont reparties. Exit les Elfes, les Nains et les Half-Orcs, ne restent que des humains (en déclinaisons de Chevaliers, Clercs et la nouvelle classe de Nécromanciens) pour accompagner les nouveaux arrivants.

Mais pas trop neuf non plus.

Qu'ont donc ces nouvelles races de plus que les autres, mis à part un nouveau nom, de nouveaux graphismes et de nouvelles voix (plutôt sympas d'ailleurs)? En gros, pas grand chose -- comme d'habitude, des statistiques de départ un peu différentes. Les trolls sont forts mais un peu abrutis, de même pour les minotaures, mais un peu moins bêtes, un peu moins puissants, dotés d'une (petite) capacité à lancer des sorts, les dark elfes et vampires sont encore moins forts mais déjà meilleurs avec la magie; quant aux dragons, ils sont forts en tout (et en plus ils volent, crachent du feu et font peur aux adversaires, vous comprenez qu'on puisse considérer qu'ils rendent le jeu un poil trop simple une fois qu'il vous a rejoint).
Les statistiques des personnages sont toujours les mêmes: force, endurance, intellect, personnalité, précision, vitesse et chance, dont l'importance varie en fonction de la classe. Les détails de chacune sont disponibles en permanence dans le jeu, ce qui se révèle très pratique quand on se retrouve devant un tonneau permettant de gagner 2 points dans l'une d'elles. Côté magie, on retrouve les écoles habituelles (air, terre, feu, eau, esprit, spiritisme, corps, lumière, obscurité), accompagnée de trois nouvelles "écoles" réservées respectivement aux Dark Elfes, Vampires et Dragons. Ces écoles regroupent en fait les aptitudes spéciales que possèdent ces trois races (par exemple cracher du feu pour les dragons, aspirer la vie pour les vampires et d'autres réjouissances de ce calibre). Nous reviendrons en détail sur la magie plus loin. Pour l'instant, sachant que chaque école est représentée par une aptitude, nous en arrivons au...

Système d'aptitudes.

À nouveau, les choses sont identiques à MM6 et 7 et on retrouve exactement le même système. Tout un paquet d'aptitudes sont disponibles, définissant l'efficacité de chaque personnage dans un domaine particulier. Elles sont réparties en quatre groupes: armes (épée, hache, bâton, arc, ...), armures (cuir, mailles, bouclier, ...), magie (les neuf écoles précitées) et les aptitudes diverses (marchandage, méditation, perception, identification, alchimie, ...) pour un total de 34 aptitudes, toutes n'étant bien sûr pas accessibles à toutes les classes. Vous déterminez le niveau de compétence en chaque aptitude de votre équipe en répartissant les points gagnés à chaque changement de niveau, changements qui deviennent possibles lorsque les personnages ont gagné suffisamment de points d'expérience dans les combats ou lors des quêtes. Notez qu'il est très difficile de rendre un personnage très expérimenté avec toutes les aptitudes auxquelles il a accès vu la manière dont sont répartis les points. Pour passer du premier au second niveau de compétence d'une aptitude, il faut investir 2 points, pour passer au troisième il faut utiliser 3 points, puis 4, puis 5 et ainsi de suite, autrement dit ça monte très vite et il n'y a pas des tonnes de points disponibles, du moins au début. Une fois en approche de la fin de la partie, lorsque l'argent et les points d'expérience coulent à flot (un peu trop d'ailleurs), il n'y a plus de problèmes.

Appelez-moi Grand Maître.

Les différents niveaux de compétences améliorent progressivement la réussite des personnages lorsqu'ils effectuent certaines actions (la réparation d'objets et l'alchimie par exemple), mais il y a aussi quatre niveaux de maîtrise pour chaque aptitude: Novice, Expert, Maître et Grand Maître. Pour passer Expert, il faut être au quatrième niveau de compétence d'une aptitude particulière et aller voir un instructeur, de même pour passer Maître, mais au septième niveau de compétence, et de même pour passer Grand Maître, mais au dixième niveau de compétence. Le passage d'un niveau de maîtrise à l'autre, en plus de l'amélioration habituelle de l'aptitude, ajoute de nouvelles améliorations, souvent très appréciables (temps de récupération diminué de moitié pour les aptitudes d'armes, possibilité d'utiliser une épée dans chaque main, 100% de réussite à l'ouverture sans dommages des coffres piégés, ...), mais tous les niveaux de maîtrise ne sont pas accessibles à chaque classe, et dans certains cas il est nécessaire que le personnage ait été préalablement promu.

Les promotions.

Toujours tiré des deux précédents volets de la série, les promotions sont des classes supérieures qu'atteignent les personnages lorsqu'ils ont effectué certaines quêtes. Ainsi dans MM6, un Chevalier pouvait devenir Paladin puis Croisé, dans MM7 les dernières promotions étaient doublées d'une version obscure (Prêtre de Lumière/Prêtre de l'Obscurité, Croisé/Black Knight, Archmage/Lich, ...) et dans MM8, les dernières promotions sont... les premières. Il n'y a plus qu'une seule promotion possible par classe et une seule orientation (les Clercs sont bons, les Nécromanciers sont mauvais, les autres sont neutres). Là encore, les joueurs de MM6 et 7 seront déçus et auront l'impression d'avoir fait un pas en arrière. Ça tombe bien, c'est le cas.
On en arrive (enfin?) à l'aspect suivant du jeu: l'interface. Les screenshots du jeu visibles avant sa sortie laissaient penser que le moteur 3D était encore et toujours le même mais que l'interface avait été pas mal modifiée. Une fois le jeu entre les mains, c'est confirmé, New World Computing a bien osé ressortir un jeu avec un moteur 3D horriblement daté, que même le lissage des objets 2D (monstres, arbres, objets, ...) et les effets de lumière ne sauvent plus (ça avait été le cas pour MM7, mais faut pas pousser non plus). En revanche l'interface a été revampée, pas phénoménalement, mais de façon assez utile tout de même.

Changement dans l'immobilisme.

La zone d'affichage par laquelle on se déplace dans le jeu a été agrandie et prend toute la largeur de l'écran, la colonne qui en prenait précédemment toute la partie droite est maintenant remplacée par un croisement entre une barre de statut et un système d'icônes situé en haut de l'écran, la carte étant affichée en bas à côté des faciès de vos aventuriers. Quoi d'autre? Rien. Rien? Ben non rien. La nouvelle disposition a ses avantages qu'on apprécie à leur juste valeur, mais c'est aussi la seule chose qui change. La fenêtre des statistiques des personnages était déjà la même dans Might & Magic 3, la fenêtre de l'inventaire est la même depuis MM6 (une série de cases dans lesquelles on place les objets qui en prennent chacun un nombre variable), la fenêtre des aptitudes de même, la liste des récompenses obtenues, les notes automatiques, les quêtes en cours, ... idem.

Might & Magic 7 et demi.

Du coup, quand on commence à jouer, on se demande si on ne s'est pas trompé de jeu. MM8 ressemble comme deux gouttes d'eau à MM7, avec un an de retard technologique supplémentaire. On retrouve la possibilité de reparamétrer les touches du clavier comme dans MM7, les deux modes de combat, temps réel et tour par tour, ce dernier étant le seul réellement utilisable (sauf lorsque vous serez quasi-invincibles), bref c'est pareil. Certes, l'interface de MM6 & 7 était bonne, donc on ne peut pas trop se plaindre de la retrouver, mais on aurait aimé voir ne serait-ce qu'une augmentation de la résolution (le 640x480 commence à être un peu limite).
Nous avons déjà répété de nombreuses fois à quel point le moteur 3D est vieux et daté, mais on en remet une couche, avec moult détails. Du temps de MM6, l'accélération 3D n'était pas encore monnaie courante, mais commençait tout de même à s'imposer. Malgré tout, New World Computing s'en était tenu à un moteur 3D 100% logiciel, prévu en deux déclinaisons: une pour les extérieurs et une autre pour les intérieurs. Les personnages, monstres et décorations diverses étaient des 'sprites' 2D intégrés à l'environnement 3D et le résultat final était graphiquement très moyen, pas vraiment très fluide, mais suffisant pour qu'on puisse s'intéresser au jeu. MM7 voyait l'apparition d'un support pour cartes 3D avec lissage des 'sprites' et effets de lumière pour les sorts. Le résultat était un jeu plus fluide, plus joli, toujours graphiquement moyen mais encore une fois suffisant.

Immobilisme dans l'immobilisme.

MM8 ne voit pas la moindre amélioration technique par rapport à MM7. Même lissage de la 2D, mêmes effets de lumières, et il y a quand même un an d'écart entre les deux. Résultat, ce n'est cette fois plus vraiment suffisant. Nous sommes les premiers à dire que le graphisme n'est pas le plus important dans un jeu, mais il y a tout de même une limite que MM8 est à un demi-pas de franchir. S'il n'y avait eu ne serait-ce que l'ajout de mip-mapping (technique améliorant grandement la qualité graphique des objets et décors 3D éloignés), le look aurait été nettement meilleur. Je mentionne le mip-mapping en particulier parce qu'à chaque fois qu'on voit un batiment de loin, les textures sont tout bonnement hideuses alors que cette technique, pourtant courante, suffirait à rendre le jeu presque beau (resterait encore le mélange 2D/3D à régler mais au moins ce serait regardable sans grimacer). Dans le même genre de non-améliorations, le support pour son 3D qui posait quelques problèmes (plantage du jeu) avec les cartes SBLive dans MM7 pose exactement les mêmes dans MM8. On en arrive à se demander si New World ne se fiche pas un peu du monde.

Deux doses de musique.

Mais remontons un peu la barre en abordant le sujet de la bande son. Les musiques, made in Rob King, Paul (pas John) Romero et Steve Baca (les habitués reconnaitront), sont toujours aussi excellentes, mais toujours trop courtes et trop peu nombreuses: c'est l'inconvénient des musiques sur pistes audio. Encore une fois, on regrette que New World Computing n'ait pas opté pour une solution à la Heroes of Might&Magic III à base de MP3, et encore une fois on en est réduits à utiliser des moyens détournés pour avoir de la musique en continu (celles du jeu ne tournant pas en boucle, il faut changer de région pour en lancer une nouvelle, le reste du temps c'est le silence absolu). Peu pratique, mais ça ne retire en rien à la qualité des musiques, un peu plus orientées 'musiques d'ambiance' que pour MM7 et toujours parfaitement adaptées aux différentes situations (forêts, villes, caves, combats, ...).

Et une de son.

Côté effets sonores, pas grand chose à redire non plus, c'est tout aussi bon. Des bruits des armes aux grognements des monstres en passant par les petites phrases lancées par les aventuriers, tout y est, relativement bien varié (on finit par se lasser des plaintes et exclamations des membres de l'équipe mais ça reste supportable), toujours de bonne qualité et souvent assez amusant (les minotaures en particulier ont tendance à être assez pliants quand on les découvre). Mais attention, tout ceci est basé sur la VO du jeu. Les VF de Might & Magic étant traditionnellement parmi les plus mauvaises traductions de jeux vidéo de toute l'histoire de la micro (tant au niveau des textes bourrés de fautes en tous genres que des voix pitoyables au-delà des mots), on peut émettre de nombreux doutes quant à la qualité de la traduction de MM8.
Mais assez de technique, il est temps de s'attaquer au plat de résistance. Et justement, à propos d'attaquer...
Les combats représentent toujours une part importante du jeu et s'ils sont, là encore, strictement identiques à ceux de MM6 et 7, ils paraissent cette fois vraiment trop archaïques, simples et dénués d'intérêt. Les monstres existent toujours en trois niveaux différents et sont affichés en trois couleurs différentes. Si vous vous faites aggresser par un troll tout rose, ce n'est pas Prodigy -- même si la ressemblance est frappante -- mais un troll en version forte. De même si un nain bleu vous course, ce n'est pas un schtroumpf nourri au Viagra qui vous prend pour Gargamel, mais un nain en version 'moyenne'. Vous l'aurez compris, ce 'truc' d'affichage faisait déjà bizarre avant, c'est encore pire dans MM8, le temps n'aidant pas, loin de là. Accessoirement, les monstres utilisent toujours un système de zones d'activité, autrement dit ils ne bronchent pas tant que vous n'entrez pas dans leur zone, mais contrairement à un Ultima 9 qui utilise le même système, il est impossible d'atteindre un monstre qui ne vous a pas encore remarqué, donc pas de victoires trop faciles... jusqu'à ce que vous puissiez voler en tout cas...

Des verres et des chiots.

En revanche, on retrouve une ressemblance avec Ultima 9 dans l'intelligence des monstres. Si dans ce dernier, ce sont de véritables verres à pied fournis avec chiffon lustrant, dans MM8 on se rapproche un peu plus du chiot électrique presqu'à court de jus. Les monstres vont droit vers vous, tirent à distance quand ils peuvent, fuient quand ils sont presque morts et... et ça se résume à ça. Quelle différence d'avec U9 et quel rapport avec cette histoire de chiot? Simple: dans U9, les monstres se plantent sans hésiter dans le moindre élément du décor alors que dans MM8, la plupart des éléments du décor (arbres, paysans, quakeurs et autres objets non-intelligents) n'ont aucune consistance et peuvent être traversés sans le moindre effet secondaire. Oui, ça devrait être un défaut, et c'est d'ailleurs à ajouter à la liste des vieilleries du moteur, mais sur ce coup-là, c'est plutôt utile. Les monstres n'ont plus grand chose dans quoi se planter et peuvent continuer d'aller tout droit. Quant au rapport avec le chiot, il y en a bien un, mais j'aime autant ne pas le dévoiler. Certaines choses gagnent à rester dans le mystère... et d'autres sont tellement ridicules qu'il ne vaut mieux pas s'y attarder...

Moralité,

les combats ne sont pas d'un intérêt énorme, mais puisqu'il y a en général un nombre de monstres plus que conséquent, on a suffisamment à faire pour ne pas s'ennuyer (là encore, on s'éloigne de la comparaison avec U9 et ses trois rats qui se battent avec deux veaux et un mulot). Et si l'idée de taper sans relâche sur de pauvres monstres sans défense avec votre épée vous ennuie à l'avance, ne vous inquiétez pas, la ribambelle de sorts typique des Might & Magic est toujours là. Et le chiot? Comment ça le chiot? Non, je vous ai déjà dit que je ne le dirai pas.
Les sorts de MM8 sont... exactement les mêmes que ceux de MM7. Ils sont toujours répartis de la même manière dans neuf écoles de magie différentes. La magie élémentaire, composée des écoles Air, Terre, Feu et Eau, la magie 'clerique' composée des écoles de l'Esprit, du Corps et de la Spiritualité, et les deux écoles les plus puissantes, la magie Claire et la magie Obscure. Le nombre de sorts se porte toujours à 99, soit suffisamment pour faire ce qu'on a à faire avec, et ce sont toujours les mêmes sorts qu'on se retrouve à utiliser en non-stop dès qu'on les obtient. Wizard Eye pour voir où se trouvent monstres et objets intéressants, les différents sorts de protection qui sont plus tard tous lancés par Day of Protection, Day of the Gods qui booste les stats de vos persos et Hour of Power qui leur ajoute toute une flopée de bonus. Wizard Eye est disponible en gros dès le tout début de la partie; quant aux trois autres, il faut être Maître en magie Claire pour tous les utiliser (Expert pour Day of the Gods), et l'évolution des personnages dans MM8 étant particulièrement simple et rapide, on y arrive vite. Sans oublier l'indispensable Town Portal, qui permet de se téléporter instantanément dans n'importe quelle ville dont vous avez bu l'eau de la fontaine centrale.

Quand voler devient trop simple.

Mention spéciale pour le sort Fly, obtenu 'gratuitement' dès lors qu'un Dragon rejoint l'équipe et atteint le niveau de Maître dans son aptitude de race (ce qui se fait en très très peu de temps), ce qui peut également arriver très vite pour peu qu'on aille se balader à Garrote Gorge dès le début de la partie. Non seulement le dragon en lui-même est particulièrement puissant, mais en plus l'obtention de ce sort représente en gros la fin de la partie. En effet, la plupart des monstres croisés en extérieur ne peuvent pas tirer à distance, ce qui n'est pas votre cas. Il vous suffit donc de vous envoler, de passer en mode tour par tour et d'exterminer les hordes d'ennemis qui se contentent de se planter bêtement sous vos pieds en attendant de se faire tailler en pièces. Quant aux monstres capables de tirer à distance, aucun problème non plus. En mode tour par tour vous pouvez changer votre altitude à n'importe quel moment, même lorsqu'aucun de vos personnages ne peut bouger. Autrement dit, chaque fois que des monstres vous tirent dessus, hop, changement d'altitude, les tirs passent à côté et c'est à nouveau à vous de jouer. Autant dire que les combats deviennent instantanément ridicules et sans le moindre intérêt... du moins ceux en extérieur, Fly ne fonctionnant pas en intérieur.

Armageddon's Blade.

Dans le même ordre d'idée, le plus puissant sort de magie Obscure, Armageddon, est lui aussi la clef d'une victoire assurée sans la moindre difficulté. Que fait ce sort? Il inflige à toutes les créatures présentes sur l'ensemble de la région un nombre de dommages plus que conséquent et augmentant avec le niveau de maîtrise du lanceur. Deux limitations: ce sort ne marche lui aussi qu'en extérieur et uniquement trois fois par jour. La première limitation est bienvenue puisqu'elle permet de laisser une certaine tension dans les combats en intérieur où vous pouvez encore vous faire tuer, quant à la deuxième, elle est très simple à contourner. Il suffit de lancer le sort trois fois et d'attendre sagement le jour suivant (il y a justement une commande pour ça) pour recommencer. Vous pouvez ainsi vous retrouver avec une région entière vidée de tout monstre sans avoir livré le moindre combat. Cette situation se présente principalement à la fin du jeu lorsque vous devez vidanger les quatre plans élémentaires (quatre régions totalement vides parsemées de monstres, bref pas une partie très intéressante du jeu) et où ce sort fait tout le boulot à votre place. Vous me direz qu'il suffit de ne pas utiliser ce procédé pour conserver l'intérêt du jeu, mais justement, intérêt il n'y a de toute façon pas, les combats en extérieur n'étant que de la pure rigolade en premier lieu, puis devenant une corvée carrément ennuyeuse. Les habitués des précédents M&M se demanderont pourquoi il n'est pas fait mention de sorts tels que Lloyd's Beacon, Water Walk ou encore Levitate, qui se révélaient très utiles avant, mais c'est tout simplement parce qu'ils sont quasi-inutiles dans MM8, le premier à cause de la surface de jeu encore plus petite que dans MM7, les deux autres grâce à Fly.

La fureur du Dragon.

Aux 99 sorts 'standards' s'ajoutent douze aptitudes particulières pour Dark Elfes, Vampires et Dragons (quatre pour chaque, une par niveau de maîtrise). Les Dark Elfes peuvent ainsi 'charmer' ou aveugler leurs adversaires, lancer une boule de feu ou quelques sorts utiles (Torch Light, Wizard Eye, Feather Fall), les Vampires lévitent, se transforment en brume, charment (aussi) ou absorbent les points de vie des ennemis; quant aux Dragons, ils font peur, lancent des boules de feu surpuissantes, volent (on en a déjà suffisamment parlé) et repoussent tous les adversaires alentours, le tout ajouté à leur attaque de base qui est... une boule de feu déjà bien puissante et indifférente aux éventuelles protections anti-feu des ennemis (même les monstres immunisés contre le feu se prennent l'intégralité des dommages, grosse grosse faute de design du jeu qui témoigne de la hâte dans laquelle il a été développé). Vous vous demandez encore pourquoi le recrutement du Dragon gagne la partie pour vous? Alors ajoutez à la liste de ses capacités particulières qu'il est quasi-increvable, qu'il dispose d'un nombre de points de vie impressionnant, d'un nombre de points de magie tout aussi énorme et que ses tirs ne ratent jamais (jamais) leur cible. Vous voyez mieux le problème?
Avec tout ça on en oublierait presque le point le plus important de tout jeu qui se respecte: le gameplay. Comment se déroule le jeu? Est-on immergé dans l'histoire pendant des heures entières ou n'est-ce qu'un vague passe-temps sans grand intérêt? Les précédents M&M tombaient tous dans la première catégorie, et même si MM7 était le plus court et le plus simple de la série (notez le 'était'), les originalités et méandres du scénario ainsi que le choix entre un chemin Lumineux ou Obscur influant notablement sur le déroulement du jeu compensaient les faiblesses liées à la simplification de l'histoire. Malheureusement pour MM8, il n'y a ni originalité, ni méandres du scénario, ni choix important influant sur le déroulement du jeu, et on se retrouve avec un bilan plutôt mitigé. Mais prenons les choses dans l'ordre.

Au départ était le commencement.

Vous débutez donc sur Dagger Wound Island et vous retrouvez en quelques minutes avec une bonne demi-douzaine de quêtes, dont plusieurs resteront en attente pendant une bonne partie du jeu. Dagger Wound fait partie d'un archipel soumis à un blocus des pirates de Regna (mentionnés sans apparaître dans les précédents M&M et que vous aurez la joie d'annihiler dans MM8) et votre première mission si vous l'acceptez -- et vous n'avez pas le choix -- sera de trouver le moyen de rejoindre le continent pour informer la guilde des marchands d'Alvar du blocus en question. Une fois arrivé à Ravenshore (là où se trouve le cristal d'Escaton), quelques notions de l'histoire principale arriveront à vos oreilles, ce qui correspondrait au style M&M si on ne connaissait pas déjà la quasi-totalité de l'histoire en question avant-même le début de la partie (le manuel est le coupable numéro un).

Parallèlement, la routine habituelle de M&M se met en place. Différentes régions à visiter, chacune avec une ville (Ravenshore et ses humains, Alvar et ses Dark Elfes, Ironsand et ses Trolls, Murmurwoods et ses Prêtres de la Lumière, Garrote Gorge et ses Dragons/chasseurs de Dragons, Ravage Roaming et ses Minotaures, Shadowspire et ses Nécromanciens, Dagger Wound et ses hommes-rats, Regna et ses pirates), ses boutiques (armes, armures, sorts, tavernes, banques, camps d'entraînement, ...), ses habitants sans intérêt (et ils sont nombreux), ses habitants fournisseurs de quêtes (nombreux aussi, mais moins que dans les précédents M&M, comptez une bonne trentaine/quarantaine de quêtes au total ce qui ne fait pas lourd comparé aux bons vieux M&M qui tapaient allègrement dans la centaine), ses instructeurs de compétences (un seul instructeur par niveau de compétences contrairement à MM7 où il pouvait y avoir plusieurs ##NPCs## instruisant la même chose) et ses paysans qui, contrairement à MM6 et 7, ne disent jamais rien d'intéressant, ne peuvent plus être recrutés, bref ne servent plus à rien.

Ensuite vinrent les quêtes.

Les quêtes elles-mêmes se résument dans la plupart des cas à tuer/trouver tel objet/personne puis retourner voir telle autre personne et ne sont pas bien difficiles, nettement moins que MM7 qui était déjà lui-même considéré comme très (voire trop) simple comparé à MM6. Certaines ont une petite touche comique (la plus fréquemment mentionnée est la recherche de trois morceaux de fromage dans trois temples gardés par des hommes-rats), mais jamais rien de bien folichon. On se retrouve à remplir les quêtes au gré des explorations (vous traversez les différentes régions, visitez les différents temples, discutez avec les différents personnages et remplissez les quêtes sans forcément avoir cherché à les remplir). Une seule série de quêtes sort un peu de l'ordinaire (mis à part la quête finale consistant, vous l'aurez deviné, à aller voir Escaton lui-même): il s'agit de la formation de l'alliance entre les races qui, d'après la légende des Dark Elfes, est la seule solution pour contrer la prophétie.

Les habitants de Ravenshore, Alvar et Ironsand sont alliés d'office, et vous devez vous assurer de la collaboration des Dragons et chasseurs de dragons de Garrote Gorge, des Minotaures de Ravage Roaming, du Temple du Soleil de Murmurwoods et des Nécromanciens de Shadowspire. Comme vous pouvez le deviner, les Dragons et leurs chasseurs ne s'entendent pas très bien, de même que les Prêtres du Soleil et les Nécromanciens. Vous devrez donc choisir à chaque fois l'un des deux camps pour que l'autre accepte de rejoindre l'Alliance. Similaire au choix Clair/Obscur de MM7? Pas vraiment. D'une part, le choix est vite fait (les Prêtres du Soleil sont des abrutis profonds, quant aux chasseurs, c'est bien simple, un bon chasseur est un chasseur mort, et je ne parle pas que du jeu) et d'autre part, ce choix n'a aucune, et je dis bien aucune influence sur le déroulement du jeu.

Déroulement rigide, dénouement énigmatique.

Une fois que vous avez tué tous les chasseurs de dragons de Garrotte Gorge, les habitants de la base qui y est installée continuent de vous parler comme si vous étiez un ami d'enfance et le leader des chasseurs accepte sans problème de donner le statut de Champion à vos Chevaliers. De même, les habitants de Murmurwoods restent parfaitement amicaux avec vous, même après que vous avez pillé leur temple et massacré leurs prêtres. Enfin, quelle que soit la composition de l'Alliance, la suite du jeu reste strictement identique, la constitution de cette Alliance ne servant qu'à déclencher les événements suivants, à savoir votre droit de passage sur l'île de Regna, l'arrivée d'un certain couple de souverains bien connus des initiés et, enfin, une relation entre MM8 et les précédents épisodes. Mais d'Alliance elle-même, il n'en est point question dans le scénario. Vous la constituez et ensuite c'est quand même à vous de faire tout le travail, l'Alliance ne vous aidant en rien. Sans trop en dévoiler, sachez simplement que vous devrez connaitre l'histoire de Heroes 3 pour comprendre certaines révélations, de même si vous avez joué à la première série de M&M (les épisodes 1 à 5 opposant Corak à Sheltem), la fin de MM8 devrait vous laisser impatients de voir MM9, quelle qu'ait été votre opinion du jeu lui-même.
Le déroulement de MM8 est la plupart du temps d'une banalité effarante. Le début du jeu est laborieux et à moins d'être un grand fan de la série et de ne pas s'être encore lassé du même système et moteur de jeu depuis MM6, le risque de laisser tomber après avoir commencé à jouer est bien présent. La recette Might & Magic mélangeant combats, quêtes, évolution des personnages et exploration fonctionne toujours bien, mais les faiblesses du scénario, les problèmes liés notamment à la présence du Dragon, la faible difficulté, la linéarité et la courte durée de vie sont autant de points négatifs qui nuisent fortement à l'intérêt du jeu.
Les Plus
  • Les musiques et l'ambiance sonore
  • Le dénouement final
  • Le mélange action/aventure/développement des M&M
Les Moins
  • Le manque d'originalité et de profondeur du scénario
  • Le moteur 3D ultra-dépassé
  • La faible difficulté du jeu
  • La surpuissance du dragon
  • L'absence totale d'innovations ou même d'évolutions
Résultat

Pourtant, la dernière phase du jeu (combats ennuyeux sur les plans élémentaires exceptés) et toutes les révélations qu'elle comporte peuvent faire oublier la plupart de ces points noirs, du moins pour ceux qui s'intéressent à l'histoire de la série. Pour les autres, ceux qui ont joué à MM6 et/ou 7 mais qui ne suivent pas particulièrement l'histoire, de même que pour ceux qui ne connaissent pas encore la série, MM8 est loin d'être indispensable. Mis à part ces révélations et sous-entendus (jusqu'à la dernière image d'Escaton), MM8 n'ajoute strictement rien à la série et aurait même plutôt tendance à lui faire du mal. On peut apprécier le jeu si on a apprécié MM7, mais sans plus. MM8 paye le prix d'un moteur 3D décidément trop vieux et de nombreuses faiblesses de toute évidence liées à un développement trop hâtif, ce qui est le moins pardonnable de la part de New World Computing. Plus qu'à espérer que MM9: Legends of Might & Magic, qui utilisera le LithTech Engine 2.0 comme moteur 3D, rattrapera ce demi-dérapage et rendra toutes ses lettres de noblesse à la série. Peut-être même découvrira-t-on le fin mot de l'histoire, le rôle des Anciens sur Enroth et le lien avec la première saga?

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