Test | Final Fantasy VIII
16 mars 2000

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Final Fantasy VIII

Après un succès phénoménal sur Playstation, succès justifié au demeurant, voilà que le dernier chef d'œuvre de SquareSoft débarque sur nos chers PC. On se souvient de l'adaptation pas très réussie du volet précédent, avec ses graphismes immondes, ses musiques MIDI et ses scènes cinématiques ultra-pixellisées… FF8 nous gratifie-t-il des mêmes bourdes? Oui et non...

Nombreux sont les amateurs de RPGs pécéistes qui ne peuvent généralement qu'attendre qu'un FF sorte sur leur plate-forme. En effet, il vaut mieux attendre que d'acheter une Playstation exprès pour l'occasion... Certes, si on achète une PS, on hérite aussi de plein d'autres excellents RPG Square qui ne verront jamais le jour sur PC, sauf via l'émulateur Bleem!, qui ne marche pas toujours (le plus souvent, oui, mais pas toujours), mais bref. Toujours est-il que les FFistes attendaient le 8e volet avec une impatience justifiée car, sans être nécessairement le plus abouti de la série, il a l'avantage d'être un des plus réussis du point de vue de l'histoire et apporte, plus encore que les autres, un petit (oui, petit) côté adulte non-négligeable. Evidemment, ça n'a rien d'une histoire hautement psychologique et métaphysique, mais certaines réflexions amenées par les héros, plus particulièrement par Squall (le héros), ne sont pas indignes d'intérêt, sans être d'une profondeur abyssale. Cela étant, on n'échappe pas pour autant aux niaiseries dont les japonais semblent très friands, à l'opposé de la plupart des gens des civilisations plus occidentales.

Un peu d'histoire...

Un rêve curieux

Final Fantasy VII, en son temps, avait quelque peu marqué par son lot d'innovations, tout particulièrement par l'apport de scènes cinématiques, de décors tridimensionnels précalculés ou temps réel (pour les combats), et surtout des models des héros, en 3D eux aussi; sans compter les effets pyrotechniques hallucinants des pouvoirs magiques, impressionnants pour les sorts et invocations les plus puissants. On se souvient du 6e volet sur SNES, dont la seule 3D était celle de la carte du monde (vive le mode 7), mais dont les graphismes en général, et plus particulièrement les effets magiques des invocations d'Espers étaient déjà assez impressionnants pour une SNES (Alexander, Ragnarok, Crusader, Odin…). La conversion du 7e volet sur PC, quant à elle, fut un ratage quasi total. Certes, le fond du jeu était toujours là, et il était toujours excellent (si on fait abstraction de l'extrême niaiserie des relations entre Cloud/Tifa/Aeris), mais la forme était immonde. Backgrounds pixellisés à outrance, scènes cinématiques affreuses, musique MIDI, bref le côté technique était très décevant. Cependant, Nobuo Uematsu, compositeur des musiques de tous les FF et de la plupart des jeux Square, est loin d'être un amateur et a fait des musiques de Final Fantasy d'absolues références en matière de musique de jeux; hélas reproduites en MIDI, les musiques des FF7 et 8 sur PC sont néanmoins suffisamment excellentes pour qu'on se demande s'il s'agit réellement de MIDI. On s'aperçoit cependant du génie du compositeur seulement lorsqu'on entend les versions orchestrées des mêmes musiques…

Adaptation pas top...

Perdue dans l'espace?

Oui, il faut le dire, FF8 n'échappe pas à la règle de la mauvaise adaptation PS-PC, dont Square semble assez peu soucieux. Les backgrounds où vous évoluerez sont toujours moches, et l'apposition de vos persos dans ces derniers donnent l'impression qu'ils n'ont rien à y faire, comme par exemple la tête de Sandra Bullock apposée à la place de celle d'une actrice XXX dans un très mauvais montage photo (navré pour la comparaison douteuse, mais c'est vraiment à ça que ça fait penser). Pire que tout, la carte du monde (sur laquelle s'effectuent les déplacements entre les lieux importants), espèce de bouillie 3D informe de textures floues et de models 3D ridicules. Ceux des personnages d'ailleurs ne sont pas des plus réussis : les persos sont grossiers, sont raides comme des piquets lorsqu'ils se déplacent. Pourtant le jeu utilise des tonnes de petites animations vachement réussies, notamment lors des dialogues (sans paroles), ou des confrontations entre personnages. Les musiques, elles, sont toujours en MIDI, mais d'encore meilleure facture que celles de FF7.

En revanche...

Un combat parmi tant d'autres

Square a fait par contre un gros effort du côté des scènes cinématiques; elles sont, cette fois, superbes, car très nettes, contrairement à celles du 7e volet (heureusement!). Leur animation est aussi excellente et, à les voir, il semble évident que les graphistes ont utilisé de vrais modèles humains pour les mouvements des humains du jeu (pour les scènes cinématiques en tout cas, ça ne fait aucun doute, exemple avec la scène du bal à Balamb Garden). Qualité technique mise à part, ces cinématiques sont artistiquement grandioses, d'une puissance «cinématographique» (cadrages, musiques) rarement égalée dans un jeu vidéo, que ce soit sur PC ou console. Le talent des animateurs de Squaresoft sera d'ailleurs mis à contribution dans un vrai long métrage en images de synthèse qui devrait sortir l'année prochaine. Dans le genre, et sur PC, on ne voit guère que Blizzard capable de leur tenir tête, et encore…

Maniabilité.

Une île perdue dans l'océan

FF8 n'échappe pas à la règle: les Final Fantasy sont des RPG, oui, mais des RPG faciles d'accès, contrairement aux Might & Magic, ou même à Baldur's Gate. La série de Square est forte de pas mal années d'expérience dans le domaine des jeux de rôle maniables, et FF8 en est un digne membre. La prise en main globale prend environ 1 minute, le temps d'assimiler les trois fonctions de base (Valider/Annuler/Menu) et les boutons/touches qui y font appel (NDLR : On vous conseille plus que fortement un paddle, le clavier n'est pas des plus pratique). Le reste des choses fondamentales à savoir vous est enseigné dans de petits didacticiels pas interactifs du tout, qui se veulent expliquer clairement l'utilisation des fonctions d'association de magies, et de tout ce qui tourne autour. Leur défaut est d'être parfois peu clairs (dans les versions anglaise comme française), mais sont dans leur ensemble suffisants pour comprendre les bases de l'utilisation des G-Force. Cela étant, dès lors que vous aurez assimilé tout ça, vous serez complètement lancé dans le jeu. Il n'y aura plus qu'à monter, monter, et encore monter vos persos pour être fin prêt pour le combat final vous opposant au grand méchant de l'histoire.

L'histoire.

Laguna drague

Comme tout FF qui se respecte, a fortiori quand il s'agit du dernier épisode en date, Final Fantasy 8 bénéficie d'une histoire longue et fouillée, pleine de rebondissements, qui vous tiendra en haleine jusqu'à la fin. Pour résumer (et même schématiser), il s'agit d'un jeune homme du nom de Squall, étudiant SeeD au jardin de Balamb, une académie de mercenaires spécialement bien entraînés à toutes les situations. De fil en aiguille, allant de rencontre en rencontre, il va se retrouver à la tête d'une équipe de casse-cou afin de sauver le monde de la domination d'une puissante sorcière. Histoire tout à fait classique jusque là; en effet c'est là la trame générale de tous les Final Fantasy, il suffit de remplacer "puissante sorcière" par ce que voulez ["puissant sorcier", "empereur despotique", "castor édenté" (désolé)]. Qu'à cela ne tienne, c'est aussi la trame de quelques centaines d'autres jeux, on ne leur en tient pas rigueur pour autant. D'ailleurs, quand on parle de "trame", c'est vraiment de cela qu'il s'agit, tellement elle est noyée dans la kyrielle de détails qui l'animent de toutes parts, dans le cas de Final Fantasy 8.

Lourdeurs.

L'attaque du train

Puisqu'on parle des détails qui font le jeu, venons-en à ceux qui dégradent le gameplay, surtout lorsqu'ils sont liés comme ici à l'histoire. Ils sont relativement nombreux, et méritent par là d'être soulignés. Vous serez par exemple souvent confrontés à des scènes carrément lourdes, comme celle où vous devez retrouver le recteur de l'académie SeeD, en le cherchant absolument partout dans le bâtiment. Une fois que vous aurez visité tous les endroits possibles et imaginables, alors seulement le jeu se remettra en marche pour faire avancer l'histoire… On se retrouve dans le schéma typique des jeux d'aventures linéaires, trouver la bonne action à accomplir pour débloquer l'action suivante. Hélas, il y a comme ça 2-3 moments du jeu où vous allez vraiment vous ennuyer, le pire de tous étant la recherche du bateau des SeeD d'Edea (vous verrez) et l'évasion de la prison du désert, lors de laquelle vous devrez parcourir dans les deux sens et à plusieurs reprises les étages du bâtiment en combattant tout ce qui bouge.

Combats.

Toujours l'attaque du train

L'autre aspect lourd du jeu est l'extrême fréquence des combats. En effet, vous n'échapperez généralement pas à un combat toutes les 15-20 secondes, un combat en général trop facile, qui vous fatiguera plus qu'autre chose. C'est pire encore sur la carte du monde, où il devient parfois impossible de faire un pas sans tomber sur un groupe de bestioles qui en veulent à votre peau. Un système barbant, surtout que Square est capable de mieux: ainsi dans Chrono Cross, suite de Chrono Trigger sur Playstation, les monstres sont visibles sur la carte, et en général vous décidez ou non de les affronter (pour le fun, de l'expérience, ou autre). Franchement, on aurait préféré des combats moins fréquents, mais nettement plus difficiles, plus tactiques, qui demandent plus de réflexion que le bête jetage du sort Scan puis lançage à la face de l'ennemi de toutes les magies qu'il n'aime pas. L'intérêt des combats n'en aurait été qu'amélioré, et de surcroît le jeu n'en aurait que moins énervé les plus impatients. S'il est vrai que ça peut ne pas déranger certains, il est tout à fait logique que d'autres puissent ne pas aimer du tout le coup du combat trop facile toutes les 15 secondes. Au sujet des combats toujours, les animations des magies des Guardian Forces, bien que souvent belles et spectaculaires, deviennent également vite rébarbatives. Pouvoir les passer avec la pression d'une touche aurait aidé...

Richesse.

Un boss facile, si on sait comment s'y prendre

Ce qu'on ne peut par contre pas reprocher à FF8, c'est d'être vide. L'histoire en elle-même est déjà assez tarabiscotée, et ouvre la voie à plein de spéculations (par exemple: Laguna est-il le père de Squall?); il y a aussi un aspect passé/présent/futur, et souvent vous visiterez deux fois le même endroit à deux époques distinctes. Ensuite, vous avez les Guardian Forces (G-Force ou GF)… Comme certaines materias dans FF7 (je pense notamment aux Knights of the Round Table), quelques GF (qui sont les bases des pouvoirs magiques dans FF8, on y reviendra) ne se trouvent pas directement sur le chemin logique d'évolution de l'histoire, ce qui fait que vous devrez aller barouder à gauche et à droite du monde de FF8 afin de vous les dégoter. C'est bien évidemment particulièrement recommandé, car elles s'avéreront sans doute très utiles lors du combat final, ou pour la préparation de ce dernier, et en plus ça vous aidera à visiter plus d'endroits du jeu afin d'en découvrir toute la richesse. Et encore, s'il n'y avait que ça…

Pas fouillis.

Toujours le même boss, dans le train

Et non, malgré cette profusion de détails, de trucs à faire, d'objets à trouver, le jeu n'en perd pas pour autant son ordre, et vous savez toujours en permanence ce que vous devez faire, car globalement les instructions vous sont servies sur un plateau, à l'exception de quelques moments du jeu (les fameux moments lourds), heureusement rares. La liberté de mouvement est quasi totale, et, si des problèmes strictement logistiques se posent jusqu'à la quasi-fin du jeu (difficile de traverser les mers sans véhicule approprié), vous pouvez aller presque où bon vous semblera, et la plupart des ressources du jeu vous seront accessibles en permanence, pour peu que vous puissiez aller les chercher là où elles sont dans le monde, et aussi dès lors que vous savez où les trouver! Le jeu est plein de petits bonus, comme les examens du SeeD grâce auxquels vous progressez et augmentez votre salaire (votre seule source d'argent dans FF8), ou les parties de Triades, un jeu de cartes propice aux collections…

La magie.

Bouffe ça, toi

Evidemment, il s'agira du centre de votre puissance; sans magie, impossible (ou presque) de finir le jeu… Comme FF7, FF8 innove en apportant un système totalement inédit, qui fait que vous ne pouvez pas "apprendre" de sort. Vous êtes condamné à utiliser ceux qu'on voudra bien vous donner, par le biais de sources de magie réparties un peu partout dans les lieux que vous visiterez (certaines planquées, certaines carrément invisibles, mais la plupart bien en vue). De plus, pour pouvoir faire autre chose que de la bête attaque de bourrin, vous êtes forcé – et c'est loin d'être une tare – d'associer votre perso à une GF, ce qui vous permettra d'utiliser d'autres commandes que "Attaque", et vous permettra d'associer les magies que vous avez accumulées avec certaines de vos stats. Par exemple, associer un sort à votre stat "Points de vie" fera simplement monter votre nombre maximum de points de vie. De même avec toutes les autres stats de type force, vitesse, magie, etc.

Bahamut dans toute sa splendeur

Associer une magie à une (ou plusieurs) de vos stats vous permettra donc de vous rendre plus fort, plus résistant, plus puissant en magie, etc. Plus vous utilisez vos GF plus elles gagnent en puissance, et plus elles peuvent apprendre de capacités spéciales fort utiles en combat (plus grande rapidité, etc). A noter qu'à l'inverse d'un RPG classique type Baldur's Gate, les points de stats sont attribués automatiquement lorsque vous changez de niveau. Un système efficace, qui empêche de transformer ses personnages en monstres de puissance imbattables, comme par exemple dans FF6, où il était long (mais simple) de faire apprendre tous les sorts à tous ses persos; le boss final n'en mettait pas une. Rien à dire donc de ce côté-là. Même s'il est vrai que l'adaptation technique n'est pas au niveau de ce qu'on est en droit d'attendre sur un PC récent, le reste est au rendez-vous: Final Fantasy 8 est un digne membre de la série de SqaureSoft, avec tous les éléments qui ont fait le succès incontestable de cette dernière auprès de millions de gens, à l'ouest comme à l'est.
Les Plus
  • L'aventure passionnante
  • Moins niais que ses prédécesseurs
  • Les vidéos
  • Les effets visuels des magies
Les Moins
  • Les lourdeurs à certains moments
  • Les combats, lourds aussi
  • Les graphismes trop souvent immondes
Résultat

Un scénario prenant et fouillé, des personnages qui le sont tout autant, même s'ils sont un peu stéréotypés – notez que ça se sent nettement moins que dans le 7 – et niaiseux, des effets visuels impressionnants pour les sorts de combat lourds (et pour les sorts en général aussi, d'ailleurs), on se demande d'ailleurs comment ils ont pu créer des effets aussi sublimes avec un moteur aussi pourri et en 640x480 (invariable), une bonne prise en main (malgré les quelques défauts évoqués plus haut), et surtout une durée de vie accrue. Que vous soyez néophyte ou grand amateur des Final Fantasy, ce 8e volet ne pourra que vous plaire, si vous savez faire abstraction de ses défauts graphiques qui, somme toute, ne dégradent pas l'excellente facture du gameplay proprement dit. L'histoire vaguement plus adulte que les précédents volets séduira plus de gens, ces mêmes gens qui, auparavant rebutées par la totale niaiserie des intrigues, avaient décidé d'éviter la série de Final Fantasy, ce qui peut se comprendre compte tenu de la naïveté bien orientale et bien lourde des précédents volets. FF8 reste un jeu très prenant, à la durée de vie béton (50 heures au bas mot), et si la linéarité apparente de l'aventure et le côté souvent ultra répétitif des combats peut gêner, l'aventure est trop belle pour passer à côté.

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