Test | Evolve
03 mars 2015

Évolution ou régression ?

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Evolve

Quand un jeu sort et que le public sait déjà tout sur celui-ci, c'est rarement bon signe. Ainsi Evolve est caractéristique de notre époque, et il va de soi que le jeu avait fort à faire pour surprendre après ses retards et autres phases de bêta publiques.

L'histoire

S'il est inutile de chercher une histoire digne d'intérêt dans Evolve, il est bon de s'attarder quelques lignes sur l'univers du jeu. Ainsi, le titre oppose des chasseurs à un monstre (parmi trois disponibles) à travers un environnement théoriquement hostile. Bien que la trame se limite grosso modo au concept même du jeu, la direction artistique est plutôt réussie. Ainsi, les personnages ne sont pas sans rappeler ceux de Left 4 Dead, chacun ayant un design particulièrement caractéristique. Un point qui n'est pas anodin vu qu'Evolve est développé par Turtle Rock Studios, boite à l'origine du célèbre jeu de survie coopératif. Enfin, notons que la plastique d'Evolve est plutôt à la hauteur de la next-gen actuelle, sans réellement briller pour autant. Un constat surtout valable lorsque vous jouez le monstre : la caméra éloignée favorise alors le dépaysement, en plus de ne pas trop s'attarder sur les textures des décors.
Un design séduisant

Le principe

Chaque classe comporte trois personnages.

Mais soyons honnêtes : si Evolve a fait parler de lui, c'est pour son concept. Le jeu vous place donc, au choix, dans la peau d'un chasseur ou d'un monstre. En jouant ce dernier, vous avez la possibilité de vous servir de l'environnement (par exemple en dévorant des bestioles) afin d'évoluer et d'augmenter vos capacités. En effet, chaque monstre possède quatre attaques spéciales pouvant être améliorées à chaque changement d'étape. Toutefois, tout le sel d'Evolve réside dans la partie adverse, à savoir les chasseurs. Ces derniers ont pour particularité d'être répartis en classes spécifiques : assault, médic, support et trappeur. Attaquer, soigner, booster les caractéristiques des coéquipiers ou piéger le monstre à l'aide d'un bouclier déployant une arène... les configurations sont nombreuses et complémentaires, surtout que chaque partie implique une équipe hétéroclite. En ce sens, Evolve rappelle inévitablement le précédent succès du studio, lui aussi basé sur la coopération.

Hélas, même si le parallèle est évident, un point différencie fondamentalement Evolve de Left 4 Dead : son concept est basé sur une course contre la montre sous forme de traque. Si ce point est important, c'est parce que le facteur temps conditionne inévitablement les parties. Globalement, d'un côté comme de l'autre, le schéma de jeu est souvent le même : parfois accompagnés d'un familier, le trappeur et les chasseurs traquent le monstre tandis que ce dernier tente d'atteindre sa forme finale discrètement. Une fois l'affrontement débuté, le trappeur essaye de ralentir la bête tandis que tout le monde s'en donne à cœur joie pour abattre celle-ci (et essayer de survivre). Pour sa part, le monstre s'en prendra logiquement au soigneur de l'équipe dans l'espoir d'empêcher toute régénération. Une recette qui a ses avantages mais surtout ses inconvénients, notamment en ce qui concerne le multijoueur.
Original et classique à la fois

Le multi

Vous devez choisir vos classes de prédilection afin que l'équipe soit complémentaire.

Le première chose à préciser, c'est justement qu'Evolve est presque uniquement orienté vers le multijoueur, au point que celui-ci apparaisse en tête sur l'écran d'accueil. En son temps, Left 4 Dead disposait d'un mode coop' véritablement excellent, aussi bien jouable en ligne qu'en local, voire même avec des bots. Une orientation rendue possible grâce à une structure du jeu s'apparentant à celle d'un jeu d'action, c'est-à-dire avec de nombreux ennemis à dézinguer en progressant au sein des décors. Pour sa part, Evolve ne prend de sens qu'à plusieurs, cela à cause de la structure de ses joutes (à mi-chemin entre la notion de contre-la-montre et le FPS coopératif classique). Qu'importe le mode de jeu (excepté le mode Défense dans lequel les chasseurs doivent défendre une base face au monstre déjà évolué), le jeu est toujours marqué par la nécessité de traquer le monstre le plus vite possible. Cela à pour conséquence d'entraîner une certaine redondance, mais aussi de mettre en exergue les défauts inhérents au game design.

Par exemple, la présence de jet-packs rend caduc les environnements censés être hostiles. Dès leur largage, les chasseurs n'ont de cesse de se mouvoir dans les airs, soit en suivant la bête du trappeur (capable de pister le monstre), soit en direction des signaux laissés par le monstre (bruissements d'oiseaux, traces laissées au sol, etc.). Rapidement, la routine s'installe et la traque promise excitante sur le papier se transforme en simple course allant d'un point A à un point B. De manière générale, il semble évident que le concept du jeu aurait gagné à engranger un peu de subtilité, notamment en ralentissant le rythme des parties afin de mettre en avant l'aspect cache-cache au final très relatif. C'est d'autant plus dommage que le mode Évacuation est plutôt intéressant. Il permet d'enchainer différents types de parties octroyant à tel ou tel camps un bonus en fonction des victoires. Un avantage souvent en rapport avec la configuration de la carte, justement.
Avec des "si", on refait le jeu

Pour qui ?

Dans le mode Chasse, le monstre doit atteindre sa forme finale pour pouvoir détruire le réacteur.

Evolve est moins accessible que Left 4 Dead en son temps. L'absence d'une vraie campagne tend à faire d'Evolve un jeu élitiste. En ce sens, il se rapproche parfois plus des FPS classiques que des jeux centrés sur une aventure coopérative. L'attachement au facteur temps n'est pas sans rappeler les modes où il faut désamorcer des bombes, plutôt qu'une vraie campagne dans laquelle les joueurs peuvent progresser à leur rythme (citons par exemple Halo). Tout cela pour dire – et c'est bien le principal – qu'il est impensable ou presque de savourer Evolve sans une bonne équipe et une coordination digne de ce nom. Pire encore : le jeu est forcément conditionné par l'adversaire, et affronter un monstre sachant la jouer discrète sera le seul moyen de vivre une expérience digne des cadors du genre. Vous êtes prévenu.
L'élite du multijoueur

L'anecdote

Chaque touche correspond à une attaque ou un équipement (ici visibles en bas à droite).

Une anecdote sous forme de coup de gueule. Ainsi, Evolve n'échappe pas à une règle sévissant depuis de trop nombreuses années : la nécessité, selon les développeurs, d'intégrer un système d'expérience et d'équipement afin de faire office de carotte pour le joueur. Si cet aspect est relativement justifié dans certaines productions, difficile de ne pas voir celui-ci comme une façon pour le moins artificielle de gonfler la durée de vie dans Evolve. Un élément contre-productif puisque bien des joueurs seront finalement rebutés par les premières heures de jeu, qui nécessitent de progresser pour prendre un tant soit peu de plaisir. Parfois, le fun vient aussi du fait d'avoir tout à disposition.
Tu débloques
Les Plus
  • Les personnages, très Left 4 Dead dans le design et dans l'esprit
  • C'est plutôt joli
  • Il y a de l'idée
  • La complémentarité des classes
  • Le mode Évacuation
  • Quelques situations grisantes, notamment lors des premières parties
Les Moins
  • Un concept décevant dans les faits (notamment le côté "traque")
  • Le système de progression et d'équipement
  • Les monstres, pas forcément passionnants à jouer
  • L'aspect contre-la-montre qui nuit à la tension des parties
  • Des schémas quand même redondants
  • Aucun intérêt en solo et pas de multi local, même à deux en coop'
Résultat

Au final, Evolve laisse la même impression que Titanfall un an plus tôt. Un concept très prometteur sur le papier, mais qui se révèle un peu décevant manette en main. Si la variété des classes est louable, la présence de jet-packs tronque à elle seule un pan entier du jeu : difficile de faire monter la tension et de se sentir en environnement hostile lorsque quatre gugus traversent les airs. Certains n'hésiteront pas à se demander si une progression exclusivement au sol n'aurait pas été plus judicieuse. Ceci dit, l'impression de jouer une course contre la montre est bel et bien présente, au point de souvent rogner le plaisir de l'exploration (y compris quand il s'agit de s'attaquer à la faune et à la flore). En fin de compte, Evolve séduira surtout les fans de FPS modernes, qui ne jurent que par des shoots d'adrénaline multijoueur agrémentés d'un système d'équipement gonflant (il serait temps d'en finir avec cette maudite manie). Un jeu divertissant à plusieurs, plutôt joli qui plus est, mais qui peine quand même à succéder à Left 4 Dead.

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