Test | Beyond Good & Evil
02 mars 2004

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Beyond Good & Evil
  • Éditeur Ubisoft
  • Développeur Ubisoft
  • Sortie initiale 14 nov. 2003
  • Genres Action, Aventure

Beyond Good & Evil a été accueilli sous les vivats par la presse spécialisée française, sans cartonner vraiment au hit-parade des meilleures ventes. Disponible désormais sur Xbox et GameCube, le pauvre fait du coup amende honorable en passant à 30 € seulement, soit moitié prix. C'est gentil comme attention, surtout pour un jeu récent de ce calibre, mais il n'est pas certain que cela suffira à doper les ventes. Beyond Good & Evil n'est en effet pas exempt de défauts, ce que son prix tout rikiki ne fera pas forcément oublier.

Leçon de séduction

Pour 30 € seulement, Beyond Good & Evil en donne autant au joueur qu'un McDo à un Ethiopien : pensez donc, pour ce prix là, vous avez un jeu d'action, d'infiltration, de photo, de course et d'aventure. La plupart du temps, il faut esquiver les ennemis en se cachant derrière des caisses et en épiant leurs rondes, voire en faisant du bruit pour les attirer. Il arrive aussi qu'il faille cogner avec un bâton qui rendrait malade de jalousie le beau Kilik, mais ces passages sont épisodiques, tout comme les déplacements à bord d'un hydroglisseur évolutif. Et puis, pour gagner de l'argent, il faut penser à prendre en photo les autochtones ainsi que la faune locale, ce qui est facile quand elle est pacifique... mais nettement plus ardu lorsqu'il faut éviter ses attaques. Le programme est tellement varié que les premières heures sont enchanteresses et qu'on ne voit pas le temps passer. Le charme de Jade, la jolie héroïne, n'est d'ailleurs pas étranger à ce petit miracle.

Une fille à part

Cette jolie brune aux yeux émeraude a une sacrée personnalité. Si elle était actrice, on pourrait même dire qu'elle crève l'écran. Elle sait s'imposer dans un plan, au détour d'une cinématique, histoire de fixer son beau regard perçant et de clouer à son pad jusqu'au joueur le plus blasé. Une grande partie du charme de Beyond Good & Evil réside dans l'intelligence de son héroïne que le joueur respecte vite, au lieu de la considérer bassement comme une femme-objet. Ici, pas question de la faire ramper dans des galeries étroites en plaçant au mieux la caméra. Jade éprouve de véritables émotions, assez bien rendues avec le moteur du jeu et grâce à un doublage français de qualité. On se sent donc assez proche d'elle, de ses préoccupations, de ses déceptions. Et puis, pour la rendre encore plus séduisante, les développeurs l'ont flanquée de quelques faire-valoir. Les personnages secondaires sont travaillés et souvent attachants, notamment le cochon Pey'j qui la suit comme son ombre et la dépanne au besoin. Certains sont hélas un peu trop caricaturaux, comme les rhinos rastas ou le rital de service.

C'est français, ça ?

Tout ça est charmant mais quand on progresse un peu dans l'aventure, on se rend compte que tout n'est pas rose dans le petit monde enchanteur de Beyond Good & Evil. Pour une production de cette ampleur, quelques vilains défauts font franchement tache. Les caméras pour commencer sont vraiment mal fichues. Elles ne savent pas cadrer l'action, laissant souvent les ennemis hors champ et obligeant Jade à fuir ou à frapper à l'aveuglette. C'est encore pire avec les bandes noires en haut et en bas de l'écran dont la présence absurde rétrécit considérablement le champ de vision, sans empêcher le jeu de ralentir ponctuellement... Et histoire d'en rajouter une couche, certains personnages accompagnant Jade sont tellement gros qu'ils la masquent complètement. Pour un jeu de ce calibre, ces défauts sont aberrants. Ce ne sont hélas pas les seuls. La durée de vie est aussi rikiki que le prix, le jeu résistant entre huit et vingt heures selon que l'on est un joueur expérimenté ou pas. C'est quand même un peu courtaud pour un jeu de ce type, surtout face à la concurrence des Mario Sunshine et autres Jak & Daxter 2.

Des murs invisibles

Ce qui déçoit aussi après quelques heures, c'est que la liberté d'action est salement limitée. Ce n'est pas très étonnant dans les donjons vu que c'est toujours comme ça dans les jeux de ce type, même si plusieurs itinéraires ou au moins plusieurs façons de progresser auraient pu être proposés. A la rigueur, on peut regretter que les phases d'infiltration soient impératives et qu'il ne soit pas possible de foncer dans le tas. Mater des boîtes de conserve faire des demi-tour chronométrés, c'est marrant cinq minutes mais ça finit par gonfler. Non, c'est surtout entre les donjons que le jeu manque d'épaisseur. Les courses sur circuit sont simplettes, les mini-jeux dans le bar aussi. Et il n'y a pas grand chose à explorer. On se heurte en permanence à des barrières ou à des obstacles que l'on ne peut franchir qu'à condition d'améliorer son hydroglisseur grâce à des perles données chichement. On est loin de la liberté de manoeuvre d'un The Legend of Zelda : The Wind Waker, qui autorisait pour sa part de vraies explorations avec son bateau, tout en offrant davantage de défis, de puzzles, d'aventures, de récompenses et de dépaysement.

pschiiiiiiiiiiiit !

En fait, quand on regarde le jeu à la loupe, on ne peut pas s'empêcher de penser que Michel Ancel a été bombardé un peu vite le Myamoto (Mario, Zelda...) et le Miyazaki (Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro) français. Beyond Good & Evil est un bon jeu, mais il n'a pas cette épaisseur là. Il lui manque la géniale originalité de ces oeuvres là, leur âme et leur perfectionnisme. Aussi talentueuse qu'elle soit, l'équipe du jeu n'a pas le savoir-faire des japonais, ces méticuleux du gameplay qui parviennent à des miracles d'équilibre et à des sommets de plaisir ludique. Outre les problèmes de caméra, Jade est par exemple dotée d'une légère inertie qui rend ses mouvements imprécis lorsqu'elle change brutalement de direction. On peut aussi regretter que le level design ne soit pas aussi inventif que dans les jeux japonais qui, apparemment, auraient pourtant servi de référence aux développeurs. Il faut croire qu'ils n'en ont pas bien repéré les principes, à commencer par la juxtaposition d'éléments simples pour créer des situations complexes. En l'état, les donjons de Beyond Good & Evil sont plats et répétitifs, ne faisant preuve ni d'inventivité, ni de renouvellement.
Les Plus
  • L'ambiance onirique
  • Le mélange des genres
Les Moins
  • Les caméras et le format 16/9e
  • Un peu trop court
Résultat

Ces reproches peuvent paraître bien cruels vu le tapage médiatique auquel le jeu a eu droit, mais ils sont à la hauteur de l'attente suscitée par ce titre dont on a un peu trop vite dit qu'il était la référence obligée du genre. Sur Xbox, où la concurrence est anémique, c'est effectivement vrai. Plus attachant que Rayman 3, il peut tout à fait trouver son public. En revanche, sur GameCube et à fortiori sur PlayStation 2, Beyond Good & Evil se fait atomiser par les StarFox Adventures et autres Ratchet & Clank 2. A moins de vouloir jouer français ou de tomber sous le charme de la belle Jade, ce bon petit jeu doté de qualités exceptionnelles et de défauts rédhibitoires fait un très bon second choix, pour peu qu'on ait déjà goûté aux autres délices du même genre.

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