Test | Dear Esther : Mémoire(s) d'outre-tombe
28 févr. 2012

Testé par sur
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Dear Esther
  • Développeur The Chinese Room
  • Sortie initiale 14 févr. 2012
  • Genres Action, Aventure

La vie de testeur de jeu vidéo se résume à manger des produits de toute sorte : bons, mauvais, hollywoodiens, cheapos, etc. Mais que ce passe t-il lorsqu'on se retrouve face à un jeu inclassable ? Dear Esther est un cas d'école.

Ma très chère Esther,

Je t'écris cette missive pour te parler de la nouvelle forme que tu as adopté. En effet, lorsque je t'ai quitté pour la dernière fois, tu n'étais alors qu'un prototype crée par Dan Pinchbeck, un chercheur de l'Université de Portsmouth en 2007. L'occasion se présentait pour ton créateur de te faire assumer la forme d'une modification intégrale pour le mythique jeu nommé Half-Life². Ta présence dans la communauté des moddeurs fit grand bruit. Partout on vanta l'originalité de ton gameplay ou plutôt son absence. Les années ont passé et ne m'ont pas épargné. Pourtant, toi tu es devenue plus resplendissante que jamais. Lamartine serait heureux puisque pour toi, le temps a suspendu son vol. Les décors de l'île hébride anonyme sur laquelle prend place ton histoire sont tous simplement superbes. Le travail effectué par tes créateurs avec le moteur Source laisseront pantois même les plus acerbes critiques. Beaucoup s'attendaient à un jeu de tir quelconque et toi, tu nous livres une superbe balade champêtre au cœur de la lande écossaise. Le béotien se confondra en interrogations : "Mé ké ki faut faire ?" "Ou son lé monstre ?". Le fou ! Je te prie de m'excuser pour la tirade qui va donc suivre mais nécessité fait loi !


Ton protagoniste nous est inconnu. Quelques éléments éparses peuvent être déceler de ci de là : un accident de voiture, une île perdue et surtout une femme répondant au nom d'Esther. A divers moments de la progression, l'homme parle, dans son esprit. Tout comme moi, il adresse des lettres fictives à cette Calliope invisible afin de lui compter sa progression mais également ses regrets, sa propre histoire, des histoires. Si certaines de ses pensées sont fixes, de nombreuses élucubrations arrivent de manière aléatoire. Ta beauté peut donc ainsi être expérimentée à différents moments. A travers ses cavernes et ses côtes, l'île sans nom finira par lui livrer tous ses secrets même si jusqu'au dénouement final aucune explication ne sera offerte. Des hyènes perfides n'hésiteront pas à dire que tu pratiques des tarifs usuriers en vendant tes charmes à huit euros mais c'est sans compter les ajouts indispensables que tu as obtenu. La musique composée de main experte par Jessica Curry accompagne avec maestria la durée de l'aventure et le narrateur, à l'accent anglais si raffiné, offre une diction impeccable. Hélas, les pauvres êtes incapable de comprendre la langue d'Albion ne pourront en aucun cas profiter de tes charmes. Si pour moi, ma chère Esther, tu te révèles être une expérience unique, la multiplicité des goûts jouera probablement en ta défaveur auprès des joueurs avertis. Quelques uns pourraient même persifler tes qualités et de moquer comme une "arnaque pour hipsters". Ta durée et ton absence de véritable aspect ludique pouvant en choquer plus d'un.

Ton dévoué,
Nephandi
Les Plus
  • C'est beau
  • La narration ouverte
  • Les aspects aléatoires
  • Une musique merveilleuse
  • La déconstruction du récit
Les Moins
  • Est-ce un jeu ?
  • Huit euros pour deux heures de "jeu"
Résultat

A défaut de pouvoir mieux le décrire, Dear Esther est une expérience narrative utilisant le moteur Source. Ce n'est pas vraiment un jeu mais ça n'est pas non plus l'une de ces bouses infâmes estampillées "multimédia" que l'on nous refourguait dans les années 90. Un Myst sans énigmes, en quelque sorte. Les décors sont superbes, l'histoire intéressante et le caractère aléatoire de nombreux éléments vous forcent à chercher les réponses par vous-même. Bien sûr, ça ne sera pas forcément du goût de tout le monde, surtout à huit euros les deux heures.

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