Test | Retour vers le passé avec Broken Sword 4
19 oct. 2006

Testé par sur
Broken Sword : The Angel of Death

La série des Broken Sword (Chevaliers de Baphomet en bon français) a conclu l'époque de la "Grande Aventure" initiée par les jeux Lucas Arts et consorts. Après un troisième épisode qui a laissé sur leur faim un bon nombre d'adeptes du point & click, Charles Cecil nous propose de repartir aux quatre coins du globe avec ce bon vieux Georges Stobbart. Observons si ce filou a retrouvé la recette de la potion magique pour faire revivre le talent des deux premiers épisodes.

La chance légendaire des héros de jeux d'aventure

A défaut de résumer les épisodes précédents, penchons-nous de plus près sur la vie de notre Indiana Jones des temps modernes, le bien nommé Georges Stobbart. Après avoir vécu pendant quelques années une vie remplie de quêtes pleines de néo-templiers, de légendes incas et de rencontres inoubliables, notre explorateur américain revient à ses premiers amours : le milieu judiciaire. Fini l'aventure, notre héros en baskets a monté son propre bureau d'avocat, dans un quartier miteux de New York et combat maintenant les dettes et les factures s'accumulant sur son bureau. Heureusement pour nous, cette existence monotone prend subitement fin lorsqu'une magnifique blonde lui demande de traduire un manuscrit ancien contre une forte somme d'argent. L'hésitation n'est l'affaire que de quelques minutes, surtout quand des tueurs tous droits sortis du Parrain enfonce la porte du cabinet de George. Nous voilà donc à nouveau envoûté pour des heures de bonheur dans le monde trépidant de Mr. Stobbart qui décidément a du détruire un magasin de miroirs quand il était jeune, tant sa poisse est probante. La suite de l'histoire implique les secrets des Templiers (quels petits cachottiers !) mais aussi l'Arche d'alliance, des secrets pas très catholiques au sein du Vatican et des agents secrets. Le planning quand à lui est plutôt chargé, nos deux associés de fortune passeront un certain temps dans la Grosse Pomme, puis s'envoleront vers le climat beaucoup plus clément d'Istanbul et finiront leur éprouvant parcours à Rome. Vous aurez même le droit à un interlude dans une base militaire perdue au fin fond du désert de l'Arizona avec la charmante Nico, grand oubliée de cet épisode. Mais ne partez pas sans votre club de golf télescopique des industries Stobbart ! Pratiquer son swing ne connait de frontières.

Faire du vieux avec du neuf

Cet épisode signe le retour des parchemins truffés d'indices si vous arrivez à les décoder.

Vous l'aurez compris, le père Cecil reprend ses petites habitudes, en vous invitant à découvrir des lieux dépaysants et en relançant le scénario sur une mode très Da Vinci Code, mais sans tomber tout de même dans les poncifs, et c'est là tout le génie du studio anglais Revolution. Parlons maintenant de la forme. Esthétiquement, Les Chevaliers de Baphomet 4 emploie une version améliorée du moteur du Manuscrit de Voynich. Et même si les décors sont plutôt taillés à la serpe, les visages des personnages et leurs attitudes ont été grandement perfectionnés donnant des traits plus réalistes à Georges et ses comparses. Le gros point noir de l'épisode précédent était sa difficile gestation vers la troisième dimension (et accessoirement vers le marché console). Mais surtout son gameplay bâtard alliant déplacement de caisses, infiltration de bâtiments pullulant de mercenaires et quick-time events à la Shenmue; le tout desservi par l'hérésie suprême : l'abandon de la souris pour un jeu au clavier. Les petits gars de Revolution ont bien appris de leurs erreurs passées et le passage à la 3D semble être théoriquement résolu. Vous pouvez déplacer votre blondinet favori soit à la souris pour une approche "Old-School", soit en mélangeant le clavier pour les mouvements et la souris pour les interactions avec le décor dans un cadre plus moderne. Par ailleurs, les séquences de plate-forme et d'infiltration sont toujours présentes mais en nombre beaucoup plus limité et la majorité des phases de cache-cache se résolvent à l'aide d'énigmes bêtes et méchantes, surtout pour les pauvres gardes. Les énigmes, revenues au coeur du jeu, sont plus tordues que jamais, même parfois trop, par opposition à certaines qui peuvent sembler simples comme bonjour. Sur ce point de vue, les casse-têtes logiques et la difficulté croissante des premiers volet est à regretter. Georges devant souvent faire équipe dans cet épisode, vous pourrez employer à de nombreuses reprises votre équipier pour résoudre des actions, occuper des personnages ou pour lui demander conseil, cette aptitude rajoute un peu de fraîcheur et nous fait penser à Sam & Max ou Indiana Jones, qui adoptaient le même système. La présence d'un PDA vous permet d'enrichir ces possibilités notamment en passant des coups de téléphone, en piratant les ordinateurs par l'intermédiaire d'un mini jeu sympathique ou encore en consultant vos notes et vos objectifs actuels.

Un petit air de "déjà-vu"

La présence d'une nouvelle héroine ne signifie pas la disparition de Nico qui fera office de Guest-star.

Jusqu'ici, le constat sur le jeu est plutôt positif : nous disposons d'un solide jeu d'aventure capable de renouer avec ses aînés par des énigmes corsés et un dépaysement quasi-total. Mais attendez-une minute, où est passé "l'esprit" Broken sword ? Mais si vous savez, ce sens de l'humour "so british", ses personnages secondaires complètement loufoques et... Nicole Collard, la jolie journaliste française. Vous les retrouverez mais tout vous semblera assez fade. Tout d'abord, même si vous tomberez nez à nez avec des prêtres obsédés par les conspirations, des mafioso fans d'Elvis ou encore des serveurs turcs érotomanes, ces doux dingues si humains semblent être un paradoxe total par rapport à l'esprit "adulte" voulu pour moderniser la série. Alors oui, Georges fait des choses avec une femme, oui il y a des morts et oui le monde semble moins fantaisiste. Mais où est l'intérêt ? Gabriel Knight, incarnation de l'américain bon à rien et misogyne semblait mille fois plus à son aise dans ce domaine (surtout lorsque l'on sait que son créateur est une femme) et notre bon vieux Georges fait tache dans cette optique. L'humour frappe moins par son aspect corrosif que par ses chutes molles et ses erreurs d'adaptation. L'excellent Emmanuel Curtil n'est pas en cause mais des blagues sur le PSG dans la bouche d'un mafieux new-yorkais frisent le ridicule. Les personnages se retrouvent parfois avec des voix d'autres. Un prêtre hébraïque possède ainsi l'accent délicieux de Georges Stobbart ou encore Anna Maria, censée être italienne, déclame ses lignes de dialogues avec un accent slave. A noter, que le jeu vous permet de jouer avec les voix américaines, chose assez rare pour être signalé. Finalement, c'est un air de nostalgie qui emplit ce jeu, cette impression est véhiculée par les nombreuses références faites aux anciens opus et même aux autres jeux de Revolution. Et Les Gardiens du Temple de Salomon nous donne l'impression que le jeu d'aventure est un genre du passé.
Les Plus
  • Le retour de notre couple de choc : Georges et Nico
  • La disparition des séquences outrageuses dites "consoles" ...
  • ... Et le retour des énigmes tordues !
Les Moins
  • Pleins de petits problèmes de finition qui gachent le plaisir de jeu
  • Un ton adulte qui semble un peu superficiel et avant tout marketing
  • Le jeu manque tout de même d'originalité et le concept tend à s'essouffler
Résultat

Comme nous l'indique le verso de la boite, la fin du jeu vous amènera à verser une petite larme... ou pas. Et c'est le "ou pas" qui pose problème, Revolution nous offre un jeu avec une bonne réalisation, bourré d'énigmes retorses et viles et laisse assez d'éléments de la série pour ne pas bousculer les fans. Mais où est passé le génie de la série ? L'absence de Nico pendant deux tiers du jeu est pesante, surtout devant le manque de substance de la nouvelle coéquipière de Georges. L'humour tombe souvent à plat et la traduction hasardeuse n'aide pas à installer l'ambiance. En somme, un jeu qui réjouira les fans en manque d'aventure mais qui ne séduira pas si facilement les autres. En effet, cette épopée semble bien fade par rapport aux premières péripéties de notre américain en voyage à Paris. La loi des suites s'applique à ce jeu : rien ne vaut l'original.

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