Test | Paratopic
07 oct. 2020

Pour quelques VHS de plus

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Paratopic

La courte mais enivrante expérience de Paratopic vous plonge quelque part le long d'une frontière nord-américaine, au beau milieu d'un trafic de VHS extrêmement convoitées. Dans une ambiance qui puise allègrement dans les vertes années PSX, vous déambulez au fil de la trame scénaristique, sans jamais vraiment commettre de bonne ou de mauvaise action. Bienvenue dans Paratopic, cet ovni qui gardera à jamais une place à part dans votre bibliothèque de jeux.

L'histoire

Un couloir de commissariat. Un diner de bord de route. Une station-service. Une forêt pleine de containers. Un immeuble décrépi. Et une ville, inlassablement vide, malgré son étendue. Dans Paratopic, les chapitres s'enchaînent sans transition. Comme une téléportation. En une frame vous changez d'environnement, mais sans perdre le fil de l'histoire. Vous êtes chargé de passer la frontière avec une cargaison illégale : une mallette pleine de cassettes vidéo. Les personnages vous en parlent comme d'une drogue. Et en effet, celles et ceux qui se risquent à en glisser une dans le magnétoscope subissent d'horribles conséquences. Mais derrière ces cassettes tant désirées, se cache une organisation, et un meurtre, auquel vous serez confronté.
Psst... t'as pas une VHS pour moi ?

Le principe

C'est vrai que t'as une sale gueule.

En vue subjective, vous déambulez dans les différentes scènes qui s'offrent à vous. L'objectif dans chacune d'elle : interagir avec les quelques objets disponibles, répondre aux dialogues, jusqu'à ce que la trame soit complétée et vous permette d'accéder sans transition à la scène suivante. Ce principe, déroutant de prime abord, remettra votre perception des codes du jeu en question : avez-vous déclenché quelque chose de mauvais ? Votre personnage est-il décédé et vous reprenez le jeu plus tôt ? Alors qu'en réalité, Paratopic maîtrise parfaitement ces codes et vous incite à les dépasser. Le temps semble long dans cette forêt que vous traversez ? Au moment où cette pensée effleure votre esprit, le jeu vous téléporte 200 mètres plus loin. Paratopic s'apparente donc davantage à une expérience vidéo-ludique qu'à un jeu à proprement parler. Il n'y a pas de bonne ou mauvaise action, de bon ou mauvais dialogue. Il y a un enchaînement d'actions que vous ne pouvez pas manquer, avec quelques variantes déclenchant des trophées en fin de jeu.
Seuls les naïfs pensent que le monde est beau

Pour qui ?

I'm not saying it was aliens but...

Ne vous attendez pas à entamer une longue épopée à travers Paratopic. Le titre est en réalité plutôt court et se joue d'une traite, sans sauvegarde : comptez 45 minutes pour une partie. Il vous attirera suffisamment pour renouveler l'expérience une fois ou deux, maintenant que vous en avez saisi les ficelles. La recherche des détails, des dialogues alternatifs, des quelques références disséminées vous guideront par la suite. Son ambiance particulière, qui frôle la déprime avec sa ville abandonnée, ses murs sales et son inquiétant silence, est exacerbée par les choix de directions artistique. En effet, les conceptrices sont allées jusqu'à employer un script transformant les textures pour leur donner un aspect proche des jeux de la première PlayStation. Certains trouveront cela objectivement moche, d'autres (comme nous) seront fascinés par cette recherche du datamoshing, à savoir la dégradation volontaire et esthétique d'éléments du jeu. Il en va de même avec les voix des personnages, qui vous hérisseront le poil d'effroi à chaque intonation. Le résultat, saisissant, crée un malaise ambiant dans lequel il est plaisant de déambuler.
De l'art du moche peut naître du beau

L'anecdote

Les Français passent chaque jour en moyenne 4 h 40 devant leur télévision (Médiamétrie, 2020).

Paratopic est pour moi un titre qui joue ostensiblement avec les codes du jeu vidéo pour déstabiliser au maximum le joueur, sans jamais totalement le perdre. L'aspect visuel dégradé fera fuir les moins aventureux d'entre vous mais saura au contraire séduire les curieux : pourquoi s'efforcer d'apporter cette esthétique rétro, si ce n'est pour faire référence à quelques titres fondateurs de l'horreur de l'époque PSX, comme Silent Hill ou Resident Evil ? Je reconnais avoir été ennuyé par la lenteur de l'ascenseur après l'avoir appelé dans le lobby. Il a réellement pris le temps que mettrait un ascenseur classique dans notre quotidien. Et une fois dedans, le jeu m'a instantanément téléporté au bon étage, sans me faire revivre l'attente. C'est cela la force de Paratopic : créer des situation qui sont à la limite du jeu (pourquoi, finalement, un ascenseur devrait être plus rapide dans un jeu ?) et libérer ensuite cette frustration par des raccourcis.
L'attente, c'est 50 % du plaisir
Les Plus
  • L'ambiance visuelle et sonore, notamment les voix
  • Vos réflexes de joueur mis à mal
  • L'attractivité de ces VHS
Les Moins
  • Vraiment très court
  • Une fin abrupte
  • La scène de la voiture
Résultat

D'obscures cassettes vidéo attirent les convoitises, une organisation vous a recruté de force pour les faire passer en douce de l'autre côté de la frontière... Et au milieu de tout cela, vous dialoguez avec des personnages volontairement pixelisés, à la voix horriblement déformée. Paratopic n'est pas un long jeu, mais plutôt une courte expérience déstabilisante, parfois étrange, mais parfaitement maîtrisée. À vous de déterminer si vous lancez cette VHS ou non...

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