Test | Children of Morta
09 nov. 2019

Les enfants, c'est notre éternité

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Children of Morta

Créateur de jeux auxquels nul n'avait jusqu'à présent porté la moindre attention (Garshasp, Shadow Blade, Epic of Kings) ; Dead Mage vient de produire son œuvre phare. Auréolé d'un buzz sans commune mesure, Children of Morta avec ses arguments entendus mille fois arrive pourtant à inverser le verdict d'un procès connu d'avance. Jugez par vous-même.

L'histoire

Sur les terres lointaines de Morta régnait l'harmonie. Jusqu'au jour où la corruption d'un terrible démon imprégna les êtres. La famille Bergson, protectrice de Morta depuis des générations, reprend du service afin de lutter contre les forces du mal.

Ici l'histoire n'a rien d'original ; c'est le point de vue et la manière de la raconter qui emportent la mise. Utiliser l'éternel socle familial permet d'installer une proximité avec le joueur qui fonctionne instantanément. Les thématiques abordées à travers les personnages sont universelles et de l'ordre du vocabulaire lié au champ lexical de la famille. Dès lors, il ne s'agit plus de raconter une histoire mais d'intercaler des vignettes d'instants pour montrer l'implication physique et sentimentale d'une famille subissant les affres de l'aventure. Ces vignettes, nombreuses, rythment parfaitement l'aventure et vous donnent l'illusion d'une progression, d'un cheminement permanent, en ponctuant chacun de vos retours à la maison, qu'importent les réussites et les échecs.
La manière de la raconter emporte la mise

Le principe

Les niveaux sont riches de détails.

À la manière de Bastion, Children of Morta prive ses protagonistes de dialogues, et le soin est laissé à une voix off d'habiller ces vignettes narratives. L'impact est saisissant de puissance, tant par le timbre du narrateur que par la concision du texte. Extrêmement écrits, très romanesques, les propos donnent une épaisseur, un sérieux à la famille Bergson qui en impose.

D'autant plus que ses graphismes en pixel art donnent au jeu un cachet pointilliste du plus bel effet, entre clairs-obscurs et contrastes colorés qui vous émerveillent. La maison des Bergson est un ravissement aux détails décoratifs succulents, et les donjons, marqués des vestiges de vies anciennes, laissent entrevoir les légendes sous-jacentes. Il est simplement dommage que les ennemis et surtout les boss n'aient rien d'inoubliable ; et que leurs designs difformes et crapoussins s'intègrent si mal à l'univers.
Ses graphismes en pixel art donnent au jeu un cachet pointilliste du plus bel effet

Le principe

Les petits temples boostent les stats.

Le jeu se découpe en deux zones distinctes. La maison qui vous permet d'améliorer des compétences partagées par la famille Bergson, et au sous-sol les portails qui vous téléportent vers des donjons générés procéduralement. Pour ce qui est de l'architecture des donjons, elle est rudimentaire et impersonnelle. Pour ne rien arranger, la taille réduite des niveaux fait que, malgré les chemins multiples, ils se traversent rapidement et dans une certaine indifférence. Tant bien que mal, quelques pièces spéciales (contenant marchands, énigmes, défis et trésors) viennent casser la monotonie des parcours et des temples en vous conférant des bonus changeant les allures des voyages.

Pour ce qui est de la jouabilité, Children of Morta est un hack and slash des plus classiques, c'est-à-dire qu'il vous faut faire face à des hordes de monstres dans des donjons. Les personnages, eux, ne valent que pour ce qu'ils incarnent au sein de cette prodigieuse narration et restent des archétypes courants (chevalier, archère, magicien...) mais aux compétences et aux capacités suffisamment distinctes pour que tous se montrent intéressants à jouer. De toute façon vous n'avez pas le choix : vos héros, après chaque sortie, se voient arbitrairement infliger des malus de santé, vous contraignant à prendre un autre personnage. Vous l'aurez compris, tout cela va dans le sens de la narration, l'intérêt étant de créer une véritable chronique familiale qui engage chacun de ses membres. Si l'idée fait sens, cette imposition dérange parfois, la relation d'apprentissage et d'empathie avec les personnages est souvent mise à mal et frustrante.
L'apprentissage et l'empathie avec les personnages sont souvent mis à mal

Pour qui ?

Soyez patient !

L'argument en or de son mode multijoueur local séduira instinctivement tous ceux qui cherchent à partager une partie sur canapé. En solitaire, Children of Morta ne saura parler qu'aux joueurs curieux de sa dimension narrative et à ceux qui ne connaissent pas tant que ça les genres dont il s'inspire. Les références desservent la cause du jeu de Dead Mage et laissent aux joueurs experts l'étrange sensation d'avoir entrevu ses mécaniques et ses parcours mille fois.
Pour les joueurs curieux de sa dimension narrative

L'anecdote

Repos obligatoire.

Les temps de chargement sont franchement horribles, sur ma PS4 normal ça a été quelques fois dissuasif d'y revenir. Pour un jeu qui possède des phases de jouabilité très courtes et où l'on perd assez souvent, les allers-retours entre la maison et les donjons se paient cher en temps d'attente.
Les temps de chargement sont horribles
Les Plus
  • Scénario originalement intégré à l'aventure
  • Entièrement jouable en coop locale
  • Jouabilité percutante...
Les Moins
  • ... mais gâchée par les temps de chargements
  • Design horrible des ennemis
Résultat

L'omniprésence du scénario jusque dans sa jouabilité, des temps de chargement interminables, des idées piochées à droite à gauche et des donjons sabrés à la hâte font de Children of Morta le jeu de trop. Pourtant, sa direction artistique, sa jouabilité solide, sa narration étincelante et ses parcours traversés – en coopération locale – à toute allure jusqu'au boss emportent l'adhésion. Children of Morta possède cette frime qui le distingue des autres.

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